1. I. La vie de l’homme – connaître et aimer Dieu
Dieu, infiniment Parfait et Bienheureux en Lui-même, dans un dessein de pure bonté, a librement créé l’homme pour le faire participer à sa vie bienheureuse. C’est pourquoi, de tout temps et en tout lieu, Il se fait proche de l’homme. Il l’appelle, l’aide à Le chercher, à Le connaître et à L’aimer de toutes ses forces. Il convoque tous les hommes que le péché a dispersés dans l’unité de sa famille, l’Église. Pour ce faire, Il a envoyé son Fils comme Rédempteur et Sauveur lorsque les temps furent accomplis. En Lui et par Lui, Il appelle les hommes à devenir, dans l’Esprit Saint, ses enfants d’adoption, et donc les héritiers de sa vie bienheureuse.
2. Pour que cet appel retentisse par toute la terre, le Christ a envoyé les apôtres qu’Il avait choisis en leur donnant mandat d’annoncer l’Évangile : " Allez, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et moi, je suis avec vous pour toujours, jusqu’à la fin du monde " (Mt 28, 19-20). Forts de cette mission, les apôtres " s’en allèrent prêcher en tout lieu, le Seigneur agissant avec eux et confirmant la Parole par les signes qui l’accompagnaient " (Mc 16, 20).
3. Ceux qui à l’aide de Dieu ont accueilli l’appel du Christ et y ont librement répondu, ont été à leur tour pressés par l’amour du Christ d’annoncer partout dans le monde la Bonne Nouvelle. Ce trésor reçu des apôtres a été gardé fidèlement par leurs successeurs. Tous les fidèles du Christ sont appelés à le transmettre de génération en génération, en annonçant la foi, en la vivant dans le partage fraternel et en la célébrant dans la liturgie et la prière (cf. Ac 2, 42).
4. Très tôt on a appelé catéchèse l’ensemble des efforts entrepris dans l’Église pour faire des disciples, pour aider les hommes à croire que Jésus est le Fils de Dieu afin que, par la foi, ils aient la vie en son nom, pour les éduquer et les instruire dans cette vie et construire ainsi le Corps du Christ (cf. CT 1).
5. " La catéchèse est une éducation de la foi des enfants, des jeunes et des adultes, qui comprend spécialement un enseignement de la doctrine chrétienne, donné en général de façon organique et systématique, en vue d’initier à la plénitude de la vie chrétienne " (CT 18).
6. Sans se confondre avec eux, la catéchèse s’articule sur un certain nombre d’éléments de la mission pastorale de l’Église, qui ont un aspect catéchétique, qui préparent la catéchèse ou qui en découlent : première annonce de l’Évangile ou prédication missionnaire pour susciter la foi ; recherche des raisons de croire ; expérience de vie chrétienne ; célébration des sacrements ; intégration dans la communauté ecclésiale ; témoignage apostolique et missionnaire (cf. CT 18).
7. " La catéchèse est liée intimement à toute la vie de l’Église. Non seulement l’extension géographique et l’augmentation numérique mais aussi, et davantage encore, la croissance intérieure de l’Église, sa correspondance avec le dessein de Dieu, dépendent essentiellement d’elle " (CT 13).
8. Les périodes de renouveau de l’Église sont aussi des temps forts de la catéchèse. Ainsi voit-on à la grande époque des Pères de l’Église de saints évêques y consacrer une part importante de leur ministère. Tels sont S. Cyrille de Jérusalem et S. Jean Chrysostome, S. Ambroise et S. Augustin, et bien d’autres Pères dont les œuvres catéchétiques demeurent des modèles.
9. Le ministère de la catéchèse puise des énergies toujours nouvelles dans les Conciles. Le Concile de Trente constitue à cet égard un exemple à souligner : il a donné à la catéchèse une priorité dans ses constitutions et ses décrets ; il est à l’origine du Catéchisme Romain qui porte aussi son nom et constitue une œuvre de premier ordre comme abrégé de la doctrine chrétienne ; il a suscité dans l’Église une organisation remarquable de la catéchèse ; il a entraîné, grâce à de saints évêques et théologiens tels S. Pierre Canisius, S. Charles Borromée, S. Toribio de Mogrovejo, S. Robert Bellarmin, la publication de nombreux catéchismes.
10. Il n’est pas étonnant, dès lors, que, dans le mouvement à la suite du deuxième Concile du Vatican (considéré par le Pape Paul VI comme le grand catéchisme des temps modernes), la catéchèse de l’Église ait de nouveau attiré l’attention. Le " Directoire général de la Catéchèse " de 1971, les sessions du Synode des évêques consacrées à l’évangélisation (1974) et à la catéchèse (1977), les exhortations apostoliques qui leur correspondent, " Evangelii nuntiandi " (1975) et " Catechesi tradendæ " (1979), en témoignent. La session extraordinaire du Synode des évêques de 1985 demanda " que soit rédigé un catéchisme ou compendium de toute la doctrine catholique tant sur la foi que sur la morale " (rapport final II B a 4). Le Saint-Père, Jean Paul II, a fait sien ce vœu émis par le Synode des évêques en reconnaissant que " ce désir répond tout à fait à un vrai besoin de l’Église universelle et des Églises particulières " (Discours 7 décembre 1985). Il mit tout en œuvre pour la réalisation de ce vœu des pères du Synode.
11. III. Le but et les destinataires de ce Catéchisme
Ce Catéchisme a pour but de présenter un exposé organique et synthétique des contenus essentiels et fondamentaux de la doctrine catholique tant sur la foi que sur la morale, à la lumière du Concile Vatican II et de l’ensemble de la Tradition de l’Église. Ses sources principales sont l’Écriture Sainte, les saints Pères, la liturgie et le Magistère de l’Église. Il est destiné à servir " comme un point de référence pour les catéchismes ou compendia qui sont composés dans les divers pays " (Synode des Évêques 1985, rapport final II B a 4).
12. Ce Catéchisme est destiné principalement aux responsables de la catéchèse : en premier lieu aux évêques, en tant que docteurs de la foi et pasteurs de l’Église. Il leur est offert comme instrument dans l’accomplissement de leur charge d’enseigner le Peuple de Dieu. A travers les évêques, il s’adresse aux rédacteurs de catéchismes, aux prêtres et aux catéchistes. Il sera aussi d’utile lecture pour tous les autres fidèles chrétiens.
13. IV. La structure de ce Catéchisme
Le plan de ce Catéchisme s’inspire de la grande tradition des catéchismes qui articulent la catéchèse autour de quatre " piliers " : la profession de la foi baptismale (le Symbole), les sacrements de la foi, la vie de la foi (les Commandements), la prière du croyant (le Notre Père).
14. Première partie : La profession de la foi
Ceux qui par la foi et le Baptême appartiennent au Christ doivent confesser leur foi baptismale devant les hommes (cf. Mt 10, 32 ; Rm 10, 9). Pour cela, le Catéchisme expose d’abord en quoi consiste la Révélation par laquelle Dieu s’adresse et se donne à l’homme, et la foi, par laquelle l’homme répond à Dieu (première section). Le symbole de la foi résume les dons que Dieu fait à l’homme comme Auteur de tout bien, comme Rédempteur, comme Sanctificateur et les articule autour des " trois chapitres " de notre Baptême – la foi en un seul Dieu : le Père Tout-puissant, le Créateur ; et Jésus-Christ, son Fils, notre Seigneur et Sauveur ; et l’Esprit Saint, dans la Sainte Église (deuxième section).
15. Deuxième partie : Les sacrements de la foi
La deuxième partie du Catéchisme expose comment le salut de Dieu, réalisé une fois pour toutes par le Christ Jésus et par l’Esprit Saint, est rendu présent dans les actions sacrées de la liturgie de l’Église (première section), particulièrement dans les sept sacrements (deuxième section).
16. Troisième partie : La vie de la foi
La troisième partie du Catéchisme présente la fin ultime de l’homme, créé à l’image de Dieu : la béatitude, et les chemins pour y parvenir : par un agir droit et libre, avec l’aide de la loi et de la grâce de Dieu (première section) ; par un agir qui réalise le double commandement de la charité, déployé dans les dix Commandements de Dieu (deuxième section).
17. Quatrième partie : La prière dans la vie de la foi
La dernière partie du Catéchisme traite du sens et de l’importance de la prière dans la vie des croyants (première section). Elle s’achève sur un bref commentaire des sept demandes de la prière du Seigneur (deuxième section). En elles, en effet, nous trouvons la somme des biens que nous devons espérer et que notre Père céleste veut nous accorder.
18. V. Indications pratiques pour l’usage de ce Catéchisme
Ce Catéchisme est conçu comme un exposé organique de toute la foi catholique. Il faut donc le lire comme une unité. De nombreux renvois en marge du texte (numéros en italique se référant à d’autres paragraphes traitant du même sujet) et l’index thématique à la fin du volume permettent de voir chaque thème dans son lien avec l’ensemble de la foi.
19. Souvent, les textes de l’Écriture Sainte ne sont pas cités littéralement mais avec la seule indication de leur référence (par " cf. ") en note. Pour une intelligence approfondie de tels passages il convient de se reporter aux textes eux-mêmes. Ces références bibliques sont un instrument de travail pour la catéchèse.
20. L’emploi des petits caractères pour certains passages indique qu’il s’agit de remarques de type historique, apologétique ou d’exposés doctrinaux complémentaires.
21. Les citations, en petits caractères, de sources patristiques, liturgiques, magistérielles ou hagiographiques sont destinées à enrichir l’exposé doctrinal. Souvent ces textes ont été choisis en vue d’un usage directement catéchétique.
22. A la fin de chaque unité thématique, une série de textes brefs résument en des formules ramassées l’essentiel de l’enseignement. Ces " En bref " ont pour but de donner des suggestions à la catéchèse locale pour des formules synthétiques et mémorisables.
23. VI. Les adaptations nécessaires
L’accent de ce Catéchisme porte sur l’exposé doctrinal. En effet, il veut aider à approfondir la connaissance de la foi. Par là même il est orienté vers la maturation de cette foi, son enracinement dans la vie et son rayonnement dans le témoignage (cf. CT 20-22 ; 25).
24. Par sa finalité même, ce Catéchisme ne se propose pas de réaliser les adaptations de l’exposé et des méthodes catéchétiques exigées par les différences de cultures, d’âges, de maturité spirituelle, de situations sociales et ecclésiales de ceux à qui s’adresse la catéchèse. Ces adaptations indispensables relèvent des catéchismes appropriés, et plus encore de ceux qui instruisent les fidèles :
Celui qui enseigne doit " se faire tout à tous " (1 Co 9, 22), pour gagner tout le monde à Jésus-Christ. (...) Surtout qu’il ne s’imagine pas qu’une seule sorte d’âmes lui soit confiée, et que par conséquent il lui est loisible d’enseigner et de former également tous les fidèles à la vraie piété, avec une seule et même méthode et toujours la même ! Qu’il sache bien que les uns sont en Jésus-Christ comme des enfants nouvellement nés, d’autres comme des adolescents, quelques-uns enfin, comme en possession de toutes leurs forces. (...) Ceux qui sont appelés au ministère de la prédication doivent, en transmettant l’enseignement des mystères, de la foi et des règles des mœurs, proportionner leurs paroles à l’esprit et à l’intelligence de leurs auditeurs (Catech. R. préface 11).
25. Pour conclure cette présentation, il est opportun de rappeler ce principe pastoral qu’énonce le Catéchisme Romain :
Toute la finalité de la doctrine et de l’enseignement doit être placée dans l’amour qui ne finit pas. Car on peut bien exposer ce qu’il faut croire, espérer ou faire ; mais surtout on doit toujours faire apparaître l’Amour de Notre Seigneur afin que chacun comprenne que tout acte de vertu parfaitement chrétien n’a pas d’autre origine que l’Amour et pas d’autre terme que l’Amour (Catech. R. préface 10).
309. La providence et le scandale du mal
Si Dieu le Père Tout-puissant, Créateur du monde ordonné et bon, prend soin de toutes ses créatures, pourquoi le mal existe-t-il ? A cette question aussi pressante qu’inévitable, aussi douloureuse que mystérieuse, aucune réponse rapide ne saura suffire. C’est l’ensemble de la foi chrétienne qui constitue la réponse à cette question : la bonté de la création, le drame du péché, l’amour patient de Dieu qui vient au devant de l’homme par ses alliances, par l’Incarnation rédemptrice de son Fils, par le don de l’Esprit, par le rassemblement de l’Église, par la force des sacrements, par l’appel à une vie bienheureuse à laquelle les créatures libres sont invitées d’avance à consentir, mais à laquelle elles peuvent aussi d’avance, par un mystère terrible, se dérober. Il n’y a pas un trait du message chrétien qui ne soit pour une part une réponse à la question du mal.
310. Mais pourquoi Dieu n’a-t-il pas créé un monde aussi parfait qu’aucun mal ne puisse y exister ? Selon sa puissance infinie, Dieu pourrait toujours créer quelque chose de meilleur (cf. S. Thomas d’A., s. th. 1, 25, 6). Cependant dans sa sagesse et sa bonté infinies, Dieu a voulu librement créer un monde " en état de voie " vers sa perfection ultime. Ce devenir comporte, dans le dessein de Dieu, avec l’apparition de certains êtres, la disparition d’autres, avec le plus parfait aussi le moins parfait, avec les constructions de la nature aussi les destructions. Avec le bien physique existe donc aussi le mal physique, aussi longtemps que la création n’a pas atteint sa perfection (cf. S. Thomas d’A., s. gent. 3, 71).
400. L’harmonie dans laquelle ils étaient, établie grâce à la justice originelle, est détruite ; la maîtrise des facultés spirituelles de l’âme sur le corps est brisée (cf. Gn 3, 7) ; l’union de l’homme et de la femme est soumise à des tensions (cf. Gn 3, 11-13) ; leurs rapports seront marqués par la convoitise et la domination (cf. Gn 3, 16). L’harmonie avec la création est rompue : la création visible est devenue pour l’homme étrangère et hostile (cf. Gn 3, 17. 19). A cause de l’homme, la création est soumise " à la servitude de la corruption " (Rm 8, 20). Enfin, la conséquence explicitement annoncée pour le cas de la désobéissance (cf. Gn 2, 17) se réalisera : l’homme " retournera à la poussière de laquelle il est formé " (Gn 3, 19). La mort fait son entrée dans l’histoire de l’humanité (cf. Rm 5, 12).
385. Dieu est infiniment bon et toutes ses œuvres sont bonnes. Cependant, personne n’échappe à l’expérience de la souffrance, des maux dans la nature – qui apparaissent comme liés aux limites propres des créatures –, et surtout à la question du mal moral. D’où vient le mal ? " Je cherchais d’où vient le mal et je ne trouvais pas de solution " dit S. Augustin (conf. 7, 7, 11), et sa propre quête douloureuse ne trouvera d’issue que dans sa conversion au Dieu vivant. Car " le mystère de l’iniquité " (2 Th 2, 7) ne s’éclaire qu’à la lumière du mystère de la piété (cf. 1 Tm 3, 16). La révélation de l’amour divin dans le Christ a manifesté à la fois l’étendue du mal et la surabondance de la grâce (cf. Rm 5, 20). Nous devons donc considérer la question de l’origine du mal en fixant le regard de notre foi sur Celui qui, seul, en est le Vainqueur (cf. Lc 11, 21-22 ; Jn 16, 11 ; 1 Jn 3, 8).
386. I. La où le péché a abondé, la grâce a surabondé
Le péché est présent dans l’histoire de l’homme : il serait vain de tenter de l’ignorer ou de donner à cette obscure réalité d’autres noms. Pour essayer de comprendre ce qu’est le péché, il faut d’abord reconnaître le lien profond de l’homme avec Dieu, car en dehors de ce rapport, le mal du péché n’est pas démasqué dans sa véritable identité de refus et d’opposition face à Dieu, tout en continuant à peser sur la vie de l’homme et sur l’histoire.
387. La réalité du péché, et plus particulièrement du péché des origines, ne s’éclaire qu’à la lumière de la Révélation divine. Sans la connaissance qu’elle nous donne de Dieu on ne peut clairement reconnaître le péché, et on est tenté de l’expliquer uniquement comme un défaut de croissance, comme une faiblesse psychologique, une erreur, la conséquence nécessaire d’une structure sociale inadéquate, etc. C’est seulement dans la connaissance du dessein de Dieu sur l’homme que l’on comprend que le péché est un abus de la liberté que Dieu donne aux personnes créées pour qu’elles puissent l’aimer et s’aimer mutuellement.
388. Le péché originel – une vérité essentielle de la foi
Avec la progression de la Révélation est éclairée aussi la réalité du péché. Bien que le Peuple de Dieu de l’Ancien Testament ait connu d’une certaine manière la condition humaine à la lumière de l’histoire de la chute narrée dans la Genèse, il ne pouvait pas atteindre la signification ultime de cette histoire, qui se manifeste seulement à la lumière de la Mort et de la Résurrection de Jésus-Christ (cf. Rm 5, 12-21). Il faut connaître le Christ comme source de la grâce pour connaître Adam comme source du péché. C’est l’Esprit-Paraclet, envoyé par le Christ ressuscité, qui est venu " confondre le monde en matière de péché " (Jn 16, 8) en révélant Celui qui en est le Rédempteur.
389. La doctrine du péché originel est pour ainsi dire " le revers " de la Bonne Nouvelle que Jésus est le Sauveur de tous les hommes, que tous ont besoin du salut et que le salut est offert à tous grâce au Christ. L’Église qui a le sens du Christ (cf. 1 Co 2, 16) sait bien qu’on ne peut pas toucher à la révélation du péché originel sans porter atteinte au mystère du Christ.
391. Derrière le choix désobéissant de nos premiers parents il y a une voix séductrice, opposée à Dieu (cf. Gn 3, 4-5) qui, par envie, les fait tomber dans la mort (cf. Sg 2, 24). L’Écriture et la Tradition de l’Église voient en cet être un ange déchu, appelé Satan ou diable (cf. Jn 8, 44 ; Ap 12, 9). L’Église enseigne qu’il a été d’abord un ange bon, fait par Dieu. " Le diable et les autres démons ont certes été créés par Dieu naturellement bons, mais c’est eux qui se sont rendus mauvais " (Cc. Latran IV en 1215 : DS 800).
392. L’Écriture parle d’un péché de ces anges (cf. 2 P 2, 4). Cette " chute " consiste dans le choix libre de ces esprits créés, qui ont radicalement et irrévocablement refusé Dieu et son Règne. Nous trouvons un reflet de cette rébellion dans les paroles du tentateur à nos premiers parents : " Vous deviendrez comme Dieu " (Gn 3, 5). Le diable est " pécheur dès l’origine " (1 Jn 3, 8), " père du mensonge " (Jn 8, 44).
393. C’est le caractère irrévocable de leur choix, et non un défaut de l’infinie miséricorde divine, qui fait que le péché des anges ne peut être pardonné. " Il n’y a pas de repentir pour eux après la chute, comme il n’y a pas de repentir pour les hommes après la mort " (S. Jean Damascène, f. o. 2, 4 : PG 94, 877C).
394. L’Écriture atteste l’influence néfaste de celui que Jésus appelle " l’homicide dès l’origine " (Jn 8, 44), et qui a même tenté de détourner Jésus de la mission reçue du Père (cf. Mt 4, 1-11). " C’est pour détruire les œuvres du diable que le Fils de Dieu est apparu " (1 Jn 3, 8). La plus grave en conséquences de ces œuvres a été la séduction mensongère qui a induit l’homme à désobéir à Dieu.
395. La puissance de Satan n’est cependant pas infinie. Il n’est qu’une créature, puissante du fait qu’il est pur esprit, mais toujours une créature : il ne peut empêcher l’édification du Règne de Dieu. Quoique Satan agisse dans le monde par haine contre Dieu et son Royaume en Jésus-Christ, et quoique son action cause de graves dommages – de nature spirituelle et indirectement même de nature physique – pour chaque homme et pour la société, cette action est permise par la divine Providence qui avec force et douceur dirige l’histoire de l’homme et du monde. La permission divine de l’activité diabolique est un grand mystère, mais " nous savons que Dieu fait tout concourir au bien de ceux qui l’aiment " (Rm 8, 28).
396. Dieu a créé l’homme à son image et l’a constitué dans son amitié. Créature spirituelle, l’homme ne peut vivre cette amitié que sur le mode de la libre soumission à Dieu. C’est ce qu’exprime la défense faite à l’homme de manger de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, " car du jour où tu en mangeras, tu mourras " (Gn 2, 17). " L’arbre de la connaissance du bien et du mal " (Gn 2, 17) évoque symboliquement la limite infranchissable que l’homme, en tant que créature, doit librement reconnaître et respecter avec confiance. L’homme dépend du Créateur, il est soumis aux lois de la création et aux normes morales qui règlent l’usage de la liberté.
397. L’homme, tenté par le diable, a laissé mourir dans son cœur la confiance envers son créateur (cf. Gn 3, 1-11) et, en abusant de sa liberté, a désobéi au commandement de Dieu. C’est en cela qu’a consisté le premier péché de l’homme (cf. Rm 5, 19). Tout péché, par la suite, sera une désobéissance à Dieu et un manque de confiance en sa bonté.
398. Dans ce péché, l’homme s’est préféré lui-même à Dieu, et par là même, il a méprisé Dieu : il a fait choix de soi-même contre Dieu, contre les exigences de son état de créature et dès lors contre son propre bien. Constitué dans un état de sainteté, l’homme était destiné à être pleinement " divinisé " par Dieu dans la gloire. Par la séduction du diable, il a voulu " être comme Dieu " (cf. Gn 3, 5), mais " sans Dieu, et avant Dieu, et non pas selon Dieu " (S. Maxime le Confesseur, ambig. : PG 91, 1156C).
399. L’Écriture montre les conséquences dramatiques de cette première désobéissance. Adam et Eve perdent immédiatement la grâce de la sainteté originelle (cf. Rm 3, 23). Ils ont peur de ce Dieu (cf. Gn 3, 9-10) dont ils ont conçu une fausse image, celle d’un Dieu jaloux de ses prérogatives (cf. Gn 3, 5).
400. L’harmonie dans laquelle ils étaient, établie grâce à la justice originelle, est détruite ; la maîtrise des facultés spirituelles de l’âme sur le corps est brisée (cf. Gn 3, 7) ; l’union de l’homme et de la femme est soumise à des tensions (cf. Gn 3, 11-13) ; leurs rapports seront marqués par la convoitise et la domination (cf. Gn 3, 16). L’harmonie avec la création est rompue : la création visible est devenue pour l’homme étrangère et hostile (cf. Gn 3, 17. 19). A cause de l’homme, la création est soumise " à la servitude de la corruption " (Rm 8, 20). Enfin, la conséquence explicitement annoncée pour le cas de la désobéissance (cf. Gn 2, 17) se réalisera : l’homme " retournera à la poussière de laquelle il est formé " (Gn 3, 19). La mort fait son entrée dans l’histoire de l’humanité (cf. Rm 5, 12).
401. Depuis ce premier péché, une véritable " invasion " du péché inonde le monde : le fratricide commis par Caïn sur Abel (cf. Gn 4, 3-15) ; la corruption universelle à la suite du péché (cf. Gn 6, 5. 12 ; Rm 1, 18-32) ; de même, dans l’histoire d’Israël, le péché se manifeste fréquemment, surtout comme une infidélité au Dieu de l’alliance et comme transgression de la Loi de Moïse ; après la Rédemption du Christ aussi, parmi les chrétiens, le péché se manifeste de nombreuses manières (cf. 1 Co 1-6 ; Ap 2-3). L’Écriture et la Tradition de l’Église ne cessent de rappeler la présence et l’universalité du péché dans l’histoire de l’homme :
Ce que la révélation divine nous découvre, notre propre expérience le confirme. Car l’homme, s’il regarde au-dedans de son cœur, se découvre également enclin au mal, submergé de multiples maux qui ne peuvent provenir de son Créateur, qui est bon. Refusant souvent de reconnaître Dieu comme son principe, l’homme a, par le fait même, brisé l’ordre qui l’orientait à sa fin dernière, et, en même temps, il a rompu toute harmonie, soit par rapport à lui-même, soit par rapport aux autres hommes et à toute la création (GS 13, § 1).
402. Conséquences du péché d’Adam pour l’humanité
Tous les hommes sont impliqués dans le péché d’Adam. S. Paul l’affirme : " Par la désobéissance d’un seul homme, la multitude (c’est-à-dire tous les hommes) a été constituée pécheresse " (Rm 5, 19) : " De même que par un seul homme le péché est entré dans le monde et par le péché la mort, et qu’ainsi la mort est passée en tous les hommes, du fait que tous ont péché... " (Rm 5, 12). A l’universalité du péché et de la mort l’apôtre oppose l’universalité du salut dans le Christ : " Comme la faute d’un seul a entraîné sur tous les hommes une condamnation, de même l’œuvre de justice d’un seul (celle du Christ) procure à tous une justification qui donne la vie " (Rm 5, 18).
403. A la suite de S. Paul l’Église a toujours enseigné que l’immense misère qui opprime les hommes et leur inclination au mal et à la mort ne sont pas compréhensibles sans leur lien avec le péché d’Adam et le fait qu’il nous a transmis un péché dont nous naissons tous affectés et qui est " mort de l’âme " (cf. Cc. Trente : DS 1512). En raison de cette certitude de foi, l’Église donne le Baptême pour la rémission des péchés même aux petits enfants qui n’ont pas commis de péché personnel (cf. Cc. Trente : DS 1514).
404. Comment le péché d’Adam est-il devenu le péché de tous ses descendants ? Tout le genre humain est en Adam " comme l’unique corps d’un homme unique " (S. Thomas d’A., mal. 4, 1) Par cette " unité du genre humain " tous les hommes sont impliqués dans le péché d’Adam, comme tous sont impliqués dans la justice du Christ. Cependant, la transmission du péché originel est un mystère que nous ne pouvons pas comprendre pleinement. Mais nous savons par la Révélation qu’Adam avait reçu la sainteté et la justice originelles non pas pour lui seul, mais pour toute la nature humaine : en cédant au tentateur, Adam et Eve commettent un péché personnel, mais ce péché affecte la nature humaine qu’ils vont transmettre dans un état déchu (cf. Cc. Trente : DS 1511-1512). C’est un péché qui sera transmis par propagation à toute l’humanité, c’est-à-dire par la transmission d’une nature humaine privée de la sainteté et de la justice originelles. Et c’est pourquoi le péché originel est appelé " péché " de façon analogique : c’est un péché " contracté " et non pas " commis ", un état et non pas un acte.
493. Les Pères de la tradition orientale appellent la Mère de Dieu " la Toute Sainte " (Panaghia), ils la célèbrent comme " indemne de toute tache de péché, ayant été pétrie par l’Esprit Saint, et formée comme une nouvelle créature " (LG 56). Par la grâce de Dieu, Marie est restée pure de tout péché personnel tout au long de sa vie.
" Qu’il me soit fait selon ta parole... "
494. A l’annonce qu’elle enfantera " le Fils du Très Haut " sans connaître d’homme, par la vertu de l’Esprit Saint (cf. Lc 1, 28-37), Marie a répondu par " l’obéissance de la foi " (Rm 1, 5), certaine que " rien n’est impossible à Dieu " : " Je suis la servante du Seigneur ; qu’il m’advienne selon ta parole " (Lc 1, 37-38). Ainsi, donnant à la parole de Dieu son consentement, Marie devint Mère de Jésus et, épousant à plein cœur, sans que nul péché la retienne, la volonté divine de salut, se livra elle-même intégralement à la personne et à l’œuvre de son Fils, pour servir, dans sa dépendance et avec lui, par la grâce de Dieu, au mystère de la Rédemption (cf. LG 56) :
Comme dit S. Irénée, " par son obéissance elle est devenue, pour elle-même et pour tout le genre humain, cause de salut " (Hær. 3, 22, 4). Aussi, avec lui, bon nombre d’anciens Pères disent : " Le nœud dû à la désobéissance d’Eve, s’est dénoué par l’obéissance de Marie ; ce que la vierge Eve avait noué par son incrédulité, la Vierge Marie l’a dénoué par sa foi " (cf. ibid.) ; comparant Marie avec Eve, ils appellent Marie " la Mère des vivants " et déclarent souvent : " par Eve la mort, par Marie la vie " (LG 56).
547. Jésus accompagne ses paroles par de nombreux " miracles, prodiges et signes " (Ac 2, 22) qui manifestent que le Royaume est présent en Lui. Ils attestent que Jésus est le Messie annoncé (cf. Lc 7, 18-23).
548. Les signes accomplis par Jésus témoignent que le Père l’a envoyé (cf. Jn 5, 36 ; 10, 25). Ils invitent à croire en lui (cf. Jn 10, 38). A ceux qui s’adressent à lui avec foi, il accorde ce qu’ils demandent (cf. Mc 5, 25-34 ; 10, 52 ; etc.). Alors les miracles fortifient la foi en Celui qui fait les œuvres de son Père : ils témoignent qu’il est le Fils de Dieu (cf. Jn 10, 31-38). Mais ils peuvent aussi être " occasion de chute " (Mt 11, 6). Ils ne veulent pas satisfaire la curiosité et les désirs magiques. Malgré ses miracles si évidents, Jésus est rejeté par certains (cf. Jn 11, 47-48) ; on l’accuse même d’agir par les démons (cf. Mc 3, 22).
549. En libérant certains hommes des maux terrestres de la faim (cf. Jn 6, 5-15), de l’injustice (cf. Lc 19, 8), de la maladie et de la mort (cf. Mt 11, 5), Jésus a posé des signes messianiques ; il n’est cependant pas venu pour abolir tous les maux ici-bas (cf. Lc 12, 13. 14 ; Jn 18, 36), mais pour libérer les hommes de l’esclavage le plus grave, celui du péché (cf. Jn 8, 34-36), qui les entrave dans leur vocation de fils de Dieu et cause tous leurs asservissements humains.
550. La venue du Royaume de Dieu est la défaite du royaume de Satan (cf. Mt 12, 26) : " Si c’est par l’Esprit de Dieu que j’expulse les démons, c’est qu’alors le Royaume de Dieu est arrivé pour vous " (Mt 12, 28). Les exorcismes de Jésus libèrent des hommes de l’emprise des démons (cf. Lc 8, 26-39). Ils anticipent la grande victoire de Jésus sur " le prince de ce monde " (Jn 12, 31). C’est par la Croix du Christ que le Royaume de Dieu sera définitivement établi : " Dieu a régné du haut du bois " (Hymne " Vexilla Regis ").
587. Si la Loi et le Temple de Jérusalem ont pu être occasion de " contradiction " (cf. Lc 2, 34) de la part de Jésus pour les autorités religieuses d’Israël, c’est son rôle dans la rédemption des péchés, œuvre divine par excellence, qui a été pour elles la véritable pierre d’achoppement (cf. Lc 20, 17-18 ; Ps 118, 22).
588. Jésus a scandalisé les Pharisiens en mangeant avec les publicains et les pécheurs (cf. Lc 5, 30) aussi familièrement qu’avec eux-mêmes (cf. Lc 7, 36 ; 11, 37 ; 14, 1). Contre ceux d’entre eux " qui se flattaient d’être des justes et n’avaient que mépris pour les autres " (Lc 18, 9 ; cf. Jn 7, 49 ; 9, 34), Jésus a affirmé : " Je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs au repentir " (Lc 5, 32). Il est allé plus loin en proclamant face aux Pharisiens que, le péché étant universel (cf. Jn 8, 33-36), ceux qui prétendent ne pas avoir besoin de salut s’aveuglent sur eux-mêmes (cf. Jn 9, 40-41).
589. Jésus a surtout scandalisé parce qu’Il a identifié sa conduite miséricordieuse envers les pécheurs avec l’attitude de Dieu Lui-même à leur égard (cf. Mt 9, 13 ; Os 6, 6). Il est allé jusqu’à laisser entendre qu’en partageant la table des pécheurs (cf. Lc 15, 1-2), Il les admettait au banquet messianique (cf. Lc 15, 23-32). Mais c’est tout particulièrement en pardonnant les péchés que Jésus a mis les autorités religieuses d’Israël devant un dilemme. Ne diraient-elles pas avec justesse dans leur effroi : " Dieu seul peut pardonner les péchés " (Mc 2, 7) ? En pardonnant les péchés, ou bien Jésus blasphème car c’est un homme qui se fait l’égal de Dieu (cf. Jn 5, 18 ; 10, 33), ou bien Il dit vrai et sa personne rend présent et révèle le nom de Dieu (cf. Jn 17, 6. 26).
590. Seule l’identité divine de la personne de Jésus peut justifier une exigence aussi absolue que celle-ci : " Celui qui n’est pas avec moi est contre moi " (Mt 12, 30) ; de même quand Il dit qu’il y a en Lui " plus que Jonas, (...) plus que Salomon " (Mt 12, 41-42), " plus que le Temple " (Mt 12, 6) ; quand Il rappelle à son sujet que David a appelé le Messie son Seigneur (cf. Mt 12, 36. 37), quand Il affirme : " Avant qu’Abraham fut, Je Suis " (Jn 8, 58) ; et même : " Le Père et moi nous sommes un " (Jn 10, 30).
591. Jésus a demandé aux autorités religieuses de Jérusalem de croire en Lui à cause des œuvres de son Père qu’Il accomplit (cf. Jn 10, 36-38). Mais un tel acte de foi devait passer par une mystérieuse mort à soi-même pour une nouvelle " naissance d’en haut " (Jn 3, 7) dans l’attirance de la grâce divine (cf. Jn 6, 44). Une telle exigence de conversion face à un accomplissement si surprenant des promesses (cf. Is 53, 1) permet de comprendre la tragique méprise du Sanhédrin estimant que Jésus méritait la mort comme blasphémateur (cf. Mc 3, 6 ; Mt 26, 64-66). Ses membres agissaient ainsi à la fois par ignorance (cf. Lc 23, 34 ; Ac 3, 17-18) et par l’endurcissement (cf. Mc 3, 5 ; Rm 11, 25) de l’incrédulité (cf. Rm 11, 20).
595. Paragraphe 2. Jésus est mort crucifié
Divisions des autorités juives à l’égard de Jésus
Parmi les autorités religieuses de Jérusalem, non seulement il s’est trouvé le pharisien Nicodème (cf. Jn 7, 52) ou le notable Joseph d’Arimathie pour être en secret disciples de Jésus (cf. Jn 19, 38-39), mais il s’est produit pendant longtemps des dissensions au sujet de Celui-ci (cf. Jn 9, 16-17 ; 10, 19-21) au point qu’à la veille même de sa passion, S. Jean peut dire d’eux qu’" un bon nombre crut en lui ", quoique d’une manière très imparfaite (Jn 12, 42). Cela n’a rien d’étonnant si l’on tient compte qu’au lendemain de la Pentecôte " une multitude de prêtres obéissait à la foi " (Ac 6, 7) et que " certains du parti des Pharisiens étaient devenus croyants " (Ac 15, 5) au point que S. Jacques peut dire à S. Paul que " plusieurs milliers de Juifs ont embrassé la foi et ce sont tous d’ardents partisans de la Loi " (Ac 21, 20).
596. Les autorités religieuses de Jérusalem n’ont pas été unanimes dans la conduite à tenir vis-à-vis de Jésus (cf. Jn 9, 16 ; 10, 19). Les pharisiens ont menacé d’excommunication ceux qui le suivraient (cf. Jn 9, 22). A ceux qui craignaient que " tous croient en Jésus et que les Romains viennent détruire notre Lieu Saint et notre nation " (Jn 11, 48), le grand prêtre Caïphe proposa en prophétisant : " Il est de votre intérêt qu’un seul homme meure pour le peuple et que la nation ne périsse pas tout entière " (Jn 11, 49-50). Le Sanhédrin, ayant déclaré Jésus " passible de mort " (Mt 26, 66) en tant que blasphémateur, mais ayant perdu le droit de mise à mort (cf. Jn 18, 31), livre Jésus aux Romains en l’accusant de révolte politique (cf. Lc 23, 2) ce qui mettra celui-ci en parallèle avec Barrabas accusé de " sédition " (Lc 23, 19). Ce sont aussi des menaces politiques que les grands prêtres exercent sur Pilate pour qu’il condamne Jésus à mort (cf. Jn 19, 12. 15. 21).
597. Les Juifs ne sont pas collectivement responsables de la mort de Jésus
En tenant compte de la complexité historique du procès de Jésus manifestée dans les récits évangéliques, et quel que puisse être le péché personnel des acteurs du procès (Judas, le Sanhédrin, Pilate) que seul Dieu connaît, on ne peut en attribuer la responsabilité à l’ensemble des Juifs de Jérusalem, malgré les cris d’une foule manipulée (cf. Mc 15, 11) et les reproches globaux contenus dans les appels à la conversion après la Pentecôte (cf. Ac 2, 23. 36 ; 3, 13-14 ; 4, 10 ; 5, 30 ; 7, 52 ; 10, 39 ; 13, 27-28 ; 1 Th 2, 14-15). Jésus lui-même en pardonnant sur la croix (cf. Lc 23, 34) et Pierre à sa suite ont fait droit à " l’ignorance " (Ac 3, 17) des Juifs de Jérusalem et même de leurs chefs. Encore moins peut-on, à partir du cri du peuple : " Que son sang soit sur nous et sur nos enfants " (Mt 27, 25) qui signifie une formule de ratification (cf. Ac 5, 28 ; 18, 6), étendre la responsabilité aux autres Juifs dans l’espace et dans le temps :
Aussi bien l’Église a-t-elle déclaré au Concile Vatican II : " Ce qui a été commis durant la passion ne peut être imputé ni indistinctement à tous les Juifs vivant alors, ni aux Juifs de notre temps. (...) Les Juifs ne doivent pas être présentés comme réprouvés par Dieu, ni maudits comme si cela découlait de la Sainte Écriture " (NA 4).
598. Tous les pécheurs furent les auteurs de la passion du Christ
L’Église, dans le Magistère de sa foi et dans le témoignage de ses saints, n’a jamais oublié que " les pécheurs eux-mêmes furent les auteurs et comme les instruments de toutes les peines qu’endura le divin Rédempteur " (Catech. R. 1, 5, 11 ; cf. He 12, 3). Tenant compte du fait que nos péchés atteignent le Christ Lui-même (cf. Mt 25, 45 ; Ac 9, 4-5), l’Église n’hésite pas à imputer aux chrétiens la responsabilité la plus grave dans le supplice de Jésus, responsabilité dont ils ont trop souvent accablé uniquement les Juifs :
Nous devons regarder comme coupables de cette horrible faute, ceux qui continuent à retomber dans leurs péchés. Puisque ce sont nos crimes qui ont fait subir à Notre-Seigneur Jésus-Christ le supplice de la croix, à coup sûr ceux qui se plongent dans les désordres et dans le mal " crucifient de nouveau dans leur cœur, autant qu’il est en eux, le Fils de Dieu par leurs péchés et le couvrent de confusion " (He 6, 6). Et il faut le reconnaître, notre crime à nous dans ce cas est plus grand que celui des Juifs. Car eux, au témoignage de l’apôtre, " s’ils avaient connu le Roi de gloire, ils ne l’auraient jamais crucifié " (1 Co 2, 8). Nous, au contraire, nous faisons profession de Le connaître. Et lorsque nous Le renions par nos actes, nous portons en quelque sorte sur Lui nos mains meurtrières (Catech. R. 1, 5, 11).
Et les démons, ce ne sont pas eux qui L’ont crucifié ; c’est toi qui avec eux L’as crucifié et Le crucifies encore, en te délectant dans les vices et les péchés (S. François d’Assise, admon. 5, 3).
599. II. La mort rédemptrice du Christ dans le dessein divin de salut
" Jésus livré selon le dessein bien arrêté de Dieu "
La mort violente de Jésus n’a pas été le fruit du hasard dans un concours malheureux de circonstances. Elle appartient au mystère du dessein de Dieu, comme S. Pierre l’explique aux Juifs de Jérusalem dès son premier discours de Pentecôte : " Il avait été livré selon le dessein bien arrêté et la prescience de Dieu " (Ac 2, 23). Ce langage biblique ne signifie pas que ceux qui ont " livré Jésus " (Ac 3, 13) n’ont été que les exécutants passifs d’un scénario écrit d’avance par Dieu.
600. A Dieu tous les moments du temps sont présents dans leur actualité. Il établit donc son dessein éternel de " prédestination " en y incluant la réponse libre de chaque homme à sa grâce : " Oui, vraiment, ils se sont rassemblés dans cette ville contre ton saint serviteur Jésus, que tu as oint, Hérode et Ponce Pilate avec les nations païennes et les peuples d’Israël (cf. Ps 2, 1-2), de telle sorte qu’ils ont accompli tout ce que, dans ta puissance et ta sagesse, tu avais prédestiné " (Ac 4, 27-28). Dieu a permis les actes issus de leur aveuglement (cf. Mt 26, 54 ; Jn 18, 36 ; 19, 11) en vue d’accomplir son dessein de salut (cf. Ac 3, 17-18).
601. " Mort pour nos péchés selon les Écritures "
Ce dessein divin de salut par la mise à mort du " Serviteur, le Juste " (Is 53, 11 ; cf. Ac 3, 14) avait été annoncé par avance dans l’Écriture comme un mystère de rédemption universelle, c’est-à-dire de rachat qui libère les hommes de l’esclavage du péché (cf. Is 53, 11-12 ; Jn 8, 34-36). S. Paul professe, dans une confession de foi qu’il dit avoir " reçue " (1 Co 15, 3) que " le Christ est mort pour nos péchés selon les Écritures " (ibidem ; cf. aussi Ac 3, 18 ; 7, 52 ; 13, 29 ; 26, 22-23). La mort rédemptrice de Jésus accomplit en particulier la prophétie du Serviteur souffrant (cf. Is 53, 7-8 et Ac 8, 32-35). Jésus lui-même a présenté le sens de sa vie et de sa mort à la lumière du Serviteur souffrant (cf. Mt 20, 28). Après sa Résurrection, il a donné cette interprétation des Écritures aux disciples d’Emmaüs (cf. Lc 24, 25-27), puis aux apôtres eux-mêmes (cf. Lc 24, 44-45).
602. " Dieu l’a fait péché pour nous "
S. Pierre peut en conséquence formuler ainsi la foi apostolique dans le dessein divin de salut : " Vous avez été affranchis de la vaine conduite héritée de vos pères par un sang précieux, comme d’un agneau sans reproche et sans tache, le Christ, discerné avant la fondation du monde et manifesté dans les derniers temps à cause de vous " (1 P 1, 18-20). Les péchés des hommes, consécutifs au péché originel, sont sanctionnés par la mort (cf. Rm 5, 12 ; 1 Co 15, 56). En envoyant son propre Fils dans la condition d’esclave (cf. Ph 2, 7), celle d’une humanité déchue et vouée à la mort à cause du péché (cf. Rm 8, 3), " Dieu l’a fait péché pour nous, lui qui n’avait pas connu le péché, afin qu’en lui nous devenions justice pour Dieu " (2 Co 5, 21).
603. Jésus n’a pas connu la réprobation comme s’il avait lui-même péché (cf. Jn 8, 46). Mais dans l’amour rédempteur qui l’unissait toujours au Père (cf. Jn 8, 29), il nous a assumé dans l’égarement de notre péché par rapport à Dieu au point de pouvoir dire en notre nom sur la croix : " Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné " (Mc 15, 34 ; Ps 22, 1). L’ayant rendu ainsi solidaire de nous pécheurs, " Dieu n’a pas épargné son propre Fils mais l’a livré pour nous tous " (Rm 8, 32) pour que nous soyons " réconciliés avec Lui par la mort de son Fils " (Rm 5, 10).
604. Dieu a l’initiative de l’amour rédempteur universel
En livrant son Fils pour nos péchés, Dieu manifeste que son dessein sur nous est un dessein d’amour bienveillant qui précède tout mérite de notre part : " En ceci consiste l’amour : ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu, mais c’est lui qui nous a aimés et qui a envoyé son Fils en victime de propitiation pour nos péchés " (1 Jn 4, 10 ; cf. 4, 19). " La preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ, alors que nous étions encore pécheurs, est mort pour nous " (Rm 5, 8).
605. Cet amour est sans exclusion Jésus l’a rappelé en conclusion de la parabole de la brebis perdue : " Ainsi on ne veut pas, chez votre Père qui est aux cieux, qu’un seul de ses petits ne se perde " (Mt 18, 14). Il affirme " donner sa vie en rançon pour la multitude " (Mt 20, 28) ; ce dernier terme n’est pas restrictif : il oppose l’ensemble de l’humanité à l’unique personne du Rédempteur qui se livre pour la sauver (cf. Rm 5, 18-19). L’Église, à la suite des apôtres (cf. 2 Co 5, 15 ; 1 Jn 2, 2), enseigne que le Christ est mort pour tous les hommes sans exception : " Il n’y a, il n’y a eu et il n’y aura aucun homme pour qui le Christ n’ait pas souffert " (Cc. Quiercy en 853 : DS 624).
612. La coupe de la Nouvelle Alliance, que Jésus a anticipée à la Cène en s’offrant lui-même (cf. Lc 22, 20), il l’accepte ensuite des mains du Père dans son agonie à Gethsémani (cf. Mt 26, 42) en se faisant " obéissant jusqu’à la mort " (Ph 2, 8 ; cf. He 5, 7-8). Jésus prie : " Mon Père, s’il est possible que cette coupe passe loin de moi... " (Mt 26, 39). Il exprime ainsi l’horreur que représente la mort pour sa nature humaine. En effet celle-ci, comme la nôtre, est destinée à la vie éternelle ; en plus, à la différence de la nôtre, elle est parfaitement exempte du péché (cf. He 4, 15) qui cause la mort (cf. Rm 5, 12) ; mais surtout elle est assumée par la personne divine du " Prince de la Vie " (Ac 3, 15), du " Vivant " (Ap 1, 17 ; cf. Jn 1, 4 ; 5, 26). En acceptant dans sa volonté humaine que la volonté du Père soit faite (cf. Mt 26, 42), il accepte sa mort en tant que rédemptrice pour " porter lui-même nos fautes dans son corps sur le bois " (1 P 2, 24).
613. La mort du Christ est le sacrifice unique et définitif
La mort du Christ est à la fois le sacrifice Pascal qui accomplit la rédemption définitive des hommes (cf. 1 Co 5, 7 ; Jn 8, 34-36) par l’Agneau qui porte le péché du monde (cf. Jn 1, 29 ; 1 P 1, 19) et le sacrifice de la Nouvelle Alliance (cf. 1 Co 11, 25) qui remet l’homme en communion avec Dieu (cf. Ex 24, 8) en le réconciliant avec Lui par le sang répandu pour la multitude en rémission des péchés (cf. Mt 26, 28 ; Lv 16, 15-16).
614. Ce sacrifice du Christ est unique, il achève et dépasse tous les sacrifices (cf. He 10, 10). Il est d’abord un don de Dieu le Père lui-même : c’est le Père qui livre son Fils pour nous réconcilier avec lui (cf. 1 Jn 4, 10). Il est en même temps offrande du Fils de Dieu fait homme qui, librement et par amour (cf. Jn 15, 13), offre sa vie (cf. Jn 10, 17-18) à son Père par l’Esprit Saint (cf. He 9, 14), pour réparer notre désobéissance.
615. Jésus substitue son obéissance à notre désobéissance
" Comme par la désobéissance d’un seul la multitude a été constituée pécheresse, ainsi par l’obéissance d’un seul la multitude sera constituée juste " (Rm 5, 19). Par son obéissance jusqu’à la mort, Jésus a accompli la substitution du Serviteur souffrant qui " offre sa vie en sacrifice expiatoire ", " alors qu’il portait le péché des multitudes " " qu’il justifie en s’accablant lui-même de leurs fautes " (Is 53, 10-12). Jésus a réparé pour nos fautes et satisfait au Père pour nos péchés (cf. Cc. Trente : DS 1529).
616. Sur la croix, Jésus consomme son sacrifice
C’est " l’amour jusqu’à la fin " (Jn 13, 1) qui confère sa valeur de rédemption et de réparation, d’expiation et de satisfaction au sacrifice du Christ. Il nous a tous connus et aimés dans l’offrande de sa vie (cf. Ga 2, 20 ; Ep 5, 2. 25). " L’amour du Christ nous presse, à la pensée que, si un seul est mort pour tous, alors tous sont morts " (2 Co 5, 14). Aucun homme, fût-il le plus saint, n’était en mesure de prendre sur lui les péchés de tous les hommes et de s’offrir en sacrifice pour tous. L’existence dans le Christ de la Personne divine du Fils, qui dépasse et, en même temps, embrasse toutes les personnes humaines, et qui le constitue Tête de toute l’humanité, rend possible son sacrifice rédempteur pour tous.
617. " Par sa sainte passion, sur le bois de la Croix, Il nous a mérité la justification " enseigne le Concile de Trente (DS 1529) : soulignant le caractère unique du sacrifice du Christ comme " principe de salut éternel " (He 5, 9). Et l’Église vénère la Croix en chantant : " Salut, O Croix, notre unique espérance " (Hymne " Vexilla Regis ").
651. III. Sens et portée salvifique de la Résurrection
" Si le Christ n’est pas ressuscité, alors notre prédication est vaine et vaine aussi notre foi " (1 Co 15, 14). La Résurrection constitue avant tout la confirmation de tout ce que le Christ lui-même a fait et enseigné. Toutes les vérités, même les plus inaccessibles à l’esprit humain, trouvent leur justification si en ressuscitant le Christ a donné la preuve définitive qu’il avait promise, de son autorité divine.
652. La Résurrection du Christ est accomplissement des promesses de l’Ancien Testament (cf. Lc 24, 26-27. 44-48) et de Jésus lui-même durant sa vie terrestre (cf. Mt 28, 6 ; Mc 16, 7 ; Lc 24, 6-7). L’expression " selon les Écritures " (cf. 1 Co 15, 3-4 et le Symbole de Nicée-Constantinople) indique que la Résurrection du Christ accomplit ces prédictions.
653. La vérité de la divinité de Jésus est confirmée par sa Résurrection. Il avait dit : " Quand vous aurez élevé le Fils de l’Homme, alors vous saurez que Je Suis " (Jn 8, 28). La Résurrection du Crucifié démontra qu’il était vraiment " Je Suis ", le Fils de Dieu et Dieu Lui-même. S. Paul a pu déclarer aux Juifs : " La promesse faite à nos pères, Dieu l’a accomplie en notre faveur (...) ; il a ressuscité Jésus, ainsi qu’il était écrit au Psaume premier : Tu es mon Fils, moi-même aujourd’hui je t’ai engendré " (Ac 13, 32. 34 ; cf. Ps 2, 7). La Résurrection du Christ est étroitement liée au mystère de l’Incarnation du Fils de Dieu. Elle en est l’accomplissement selon le dessein éternel de Dieu.
654. Il y a un double aspect dans le mystère Pascal : par sa mort il nous libère du péché, par sa Résurrection il nous ouvre l’accès à une nouvelle vie. Celle-ci est d’abord la justification qui nous remet dans la grâce de Dieu (cf. Rm 4, 25) " afin que, comme le Christ est ressuscité des morts, nous vivions nous aussi dans une vie nouvelle " (Rm 6, 4). Elle consiste en la victoire sur la mort du péché et dans la nouvelle participation à la grâce (cf. Ep 2, 4-5 ; 1 P 1, 3). Elle accomplit l’adoption filiale car les hommes deviennent frères du Christ, comme Jésus lui-même appelle ses disciples après sa Résurrection : " Allez annoncer à mes frères " (Mt 28, 10 ; Jn 20, 17). Frères non par nature, mais par don de la grâce, parce que cette filiation adoptive procure une participation réelle à la vie du Fils unique, qui s’est pleinement révélée dans sa Résurrection.
655. Enfin, la Résurrection du Christ – et le Christ ressuscité lui-même – est principe et source de notre résurrection future : " Le Christ est ressuscité des morts, prémices de ceux qui se sont endormis (...), de même que tous meurent en Adam, tous aussi revivront dans le Christ " (1 Co 15, 20-22). Dans l’attente de cet accomplissement, le Christ ressuscité vit dans le cœur de ses fidèles. En Lui les chrétiens " goûtent aux forces du monde à venir " (He 6, 5) et leur vie est entraînée par le Christ au sein de la vie divine (cf. Col 3, 1-3) " afin qu’ils ne vivent plus pour eux-mêmes mais pour Celui qui est mort et ressuscité pour eux " (2 Co 5, 15).
908. Leur participation à la charge royale du Christ
Par son obéissance jusqu’à la mort (cf. Ph 2, 8-9), le Christ a communiqué à ses disciples le don de la liberté royale, " pour qu’ils arrachent au péché son empire en eux-mêmes par leur abnégation et la sainteté de leur vie " (LG 36) :
Celui qui soumet son propre corps et régit son âme, sans se laisser submerger par les passions est son propre maître : il peut être appelé roi parce qu’il est capable de régir sa propre personne ; il est libre et indépendant et ne se laisse captiver par un esclavage coupable (S. Ambroise, Psal. 118, 14, 30 : PL 15, 1403A).
909. " Que les laïcs, en outre, unissant leurs forces, apportent aux institutions et aux conditions de vie dans le monde, quand elles provoquent au péché, les assainissements convenables, pour qu’elles deviennent toutes conformes aux règles de la justice et favorisent l’exercice de la vertu au lieu d’y faire obstacle. En agissant ainsi ils imprègnent de valeur morale la culture et les œuvres humaines " (LG 36).
910. " Les laïcs peuvent aussi se sentir appelés ou être appelés à collaborer avec les pasteurs au service de la communauté ecclésiale, pour la croissance et la vie de celle-ci, exerçant des ministères très diversifiés, selon la grâce et les charismes que le Seigneur voudra bien déposer en eux " (EN 73).
911. Dans l’Église, " les fidèles laïcs peuvent coopérer selon le droit à l’exercice du pouvoir de gouvernement " (CIC, can. 129, § 2). Ainsi de leur présence dans les Conseils particuliers (can. 443, § 4), les Synodes diocésains (can. 463, §§ 1. 2), les Conseils pastoraux (can. 511 ; 536) ; dans l’exercice de la charge pastorale d’une paroisse (can. 517, § 2) ; la collaboration aux Conseils des affaires économiques (can. 492, § 1 ; 536) ; la participation aux tribunaux ecclésiastiques (can. 1421, § 2), etc.
912. Les fidèles doivent " distinguer avec soin entre les droits et devoirs qui leur incombent en tant que membres de l’Église et ceux qui leur reviennent comme membres de la société humaine. Qu’ils s’efforcent d’accorder harmonieusement les uns et les autres entre eux, se souvenant que la conscience chrétienne doit être leur guide en tous domaines temporels, car aucune activité humaine, fut-elle d’ordre temporel, ne peut être soustraite à l’empire de Dieu " (LG 36).
913. " Ainsi tout laïc, en vertu des dons qui lui ont été faits, constitue un témoin et en même temps un instrument vivant de la mission de l’Église elle-même ‘à la mesure du don du Christ’ (Ep 4, 7) " (LG 33).
976. " Je crois au pardon des péchés "
Le Symbole des apôtres lie la foi au pardon des péchés à la foi en l’Esprit Saint, mais aussi à la foi en l’Église et en la communion des saints. C’est en donnant l’Esprit Saint à ses apôtres que le Christ ressuscité leur a conféré son propre pouvoir divin de pardonner les péchés : " Recevez l’Esprit Saint. Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis ; ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus " (Jn 20, 22-23).
(La deuxième partie du Catéchisme traitera explicitement du pardon des péchés par le Baptême, le sacrement de Pénitence et les autres sacrements, surtout l’Eucharistie. Il suffit donc d’évoquer ici brièvement quelques données de base).
977. I. Un seul baptême pour le pardon des péchés
Notre Seigneur a lié le pardon des péchés à la foi et au Baptême : " Allez par le monde entier, proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création. Celui qui croira et sera baptisé, sera sauvé " (Mc 16, 15-16). Le Baptême est le premier et principal sacrement du pardon des péchés parce qu’il nous unit au Christ mort pour nos péchés, ressuscité pour notre justification (cf. Rm 4, 25), afin que " nous vivions nous aussi dans une vie nouvelle " (Rm 6, 4).
978. " Au moment où nous faisons notre première profession de Foi, en recevant le saint Baptême qui nous purifie, le pardon que nous recevons est si plein et si entier, qu’il ne nous reste absolument rien à effacer, soit de la faute originelle, soit des fautes commises par notre volonté propre, ni aucune peine à subir pour les expier (...). Mais néanmoins la grâce du Baptême ne délivre personne de toutes les infirmités de la nature. Au contraire nous avons encore à combattre les mouvements de la concupiscence qui ne cessent de nous porter au mal " (Catech. R. 1, 11, 3).
979. En ce combat avec l’inclination au mal, qui serait assez vaillant et vigilant pour éviter toute blessure du péché ? " Si donc il était nécessaire que l’Église eût le pouvoir de remettre les péchés, il fallait aussi que le Baptême ne fût pas pour elle l’unique moyen de se servir de ces clefs du Royaume des cieux qu’elle avait reçues de Jésus-Christ ; il fallait qu’elle fût capable de pardonner leurs fautes à tous les pénitents, quand même ils auraient péché jusqu’au dernier moment de leur vie " (Catech. R. 1, 11, 4).
980. C’est par le sacrement de Pénitence que le baptisé peut être réconcilié avec Dieu et avec l’Église :
Les pères ont eu raison d’appeler la pénitence " un baptême laborieux " (S. Grégoire de Naz., or. 39, 17 : PG 36, 356A). Ce sacrement de Pénitence est, pour ceux qui sont tombés après le Baptême, nécessaire au salut, comme l’est le Baptême lui-même pour ceux qui ne sont pas encore régénérés (Cc. Trente : DS 1672).
981. Le Christ après sa résurrection a envoyé ses apôtres " annoncer à toutes les nations le repentir en son nom en vue de la rémission des péchés " (Lc 24, 47). Ce " ministère de la réconciliation " (2 Co 5, 18), les apôtres et leurs successeurs ne l’accomplissent pas seulement en annonçant aux hommes le pardon de Dieu mérité pour nous par le Christ et en les appelant à la conversion et à la foi, mais aussi en leur communicant la rémission des péchés par le Baptême et en les réconciliant avec Dieu et avec l’Église grâce au pouvoir des clefs reçu du Christ :
L’Église a reçu les clés du Royaume des cieux, afin que se fasse en elle la rémission des péchés par le sang du Christ et l’action du Saint-Esprit. C’est dans cette Église que l’âme revit, elle qui était morte par les péchés, afin de vivre avec le Christ, dont la grâce nous a sauvés (S. Augustin, serm. 214, 11 : PL 38, 1071-1072).
982. Il n’y a aucune faute, aussi grave soit-elle, que la Sainte Église ne puisse remettre. " Il n’est personne, si méchant et si coupable qu’il soit, qui ne doive espérer avec assurance son pardon, pourvu que son repentir soit sincère " (Catech. R. 1, 11, 5). Le Christ qui est mort pour tous les hommes, veut que, dans son Église, les portes du pardon soient toujours ouvertes à quiconque revient du péché (cf. Mt 18, 21-22).
983. La catéchèse s’efforcera d’éveiller et de nourrir chez les fidèles la foi en la grandeur incomparable du don que le Christ ressuscité a fait à son Église : la mission et le pouvoir de pardonner véritablement les péchés, par le ministère des apôtres et de leurs successeurs :
Le Seigneur veut que ses disciples aient un pouvoir immense : il veut que ses pauvres serviteurs accomplissent en son nom tout ce qu’il avait fait quand il était sur la terre (S. Ambroise, pœnit. 1, 34 : PL 16, 477A).
Les prêtres ont reçu un pouvoir que Dieu n’a donné ni aux anges ni aux archanges. (...) Dieu sanctionne là-haut tout ce que les prêtres font ici-bas (S. Jean Chrysostome, sac. 3, 5 : PG 48, 643A).
Si dans l’Église il n’y avait pas la rémission des péchés, nul espoir existerait, nulle espérance d’une vie éternelle et d’une libération éternelle. Rendons grâce à Dieu qui a donné à son Église un tel don (S. Augustin, serm. 213, 8 : PL 38, 1064).
1005. II. Mourir dans le Christ Jésus
Pour ressusciter avec le Christ, il faut mourir avec le Christ, il faut " quitter ce corps pour aller demeurer auprès du Seigneur " (2 Co 5, 8). Dans ce " départ " (Ph 1, 23) qu’est la mort, l’âme est séparée du corps. Elle sera réunie à son corps le jour de la résurrection des morts (cf. SPF 28).
1006. " C’est en face de la mort que l’énigme de la condition humaine atteint son sommet " (GS 18). En un sens, la mort corporelle est naturelle, mais pour la foi elle est en fait " salaire du péché " (Rm 6, 23 ; cf. Gn 2, 17). Et pour ceux qui meurent dans la grâce du Christ, elle est une participation à la mort du Seigneur, afin de pouvoir participer aussi à sa Résurrection (cf. Rm 6, 3-9 ; Ph 3, 10-11).
1007. La mort est le terme de la vie terrestre. Nos vies sont mesurées par le temps, au cours duquel nous changeons, nous vieillissons et, comme chez tous les êtres vivants de la terre, la mort apparaît comme la fin normale de la vie. Cet aspect de la mort donne une urgence à nos vies : le souvenir de notre mortalité sert aussi à nous rappeler que nous n’avons qu’un temps limité pour réaliser notre vie :
Souviens-toi de ton Créateur aux jours de ton adolescence, (...) avant que la poussière ne retourne à la terre, selon qu’elle était, et que le souffle ne retourne à Dieu qui l’avait donné (Qo 12, 1. 7).
1008. La mort est conséquence du péché. Interprète authentique des affirmations de la Sainte Écriture (cf. Gn 2, 17 ; 3, 3 ; 3, 19 ; Sg 1, 13 ; Rm 5, 12 ; 6, 23) et de la Tradition, le Magistère de l’Église enseigne que la mort est entrée dans le monde à cause du péché de l’homme (cf. DS 1511). Bien que l’homme possédât une nature mortelle, Dieu le destinait à ne pas mourir. La mort fut donc contraire aux desseins de Dieu Créateur, et elle entra dans le monde comme conséquence du péché (cf. Sg 2, 23-24). " La mort corporelle, à laquelle l’homme aurait été soustrait s’il n’avait pas péché " (GS 18), est ainsi " le dernier ennemi " de l’homme à devoir être vaincu (cf. 1 Co 15, 26).
1009. La mort est transformée par le Christ. Jésus, le Fils de Dieu, a souffert lui aussi la mort, propre de la condition humaine. Mais, malgré son effroi face à elle (cf. Mc 14, 33-34 ; He 5, 7-8), il l’assuma dans un acte de soumission totale et libre à la volonté de son Père. L’obéissance de Jésus a transformé la malédiction de la mort en bénédiction (cf. Rm 5, 19-21).
1010. Grâce au Christ, la mort chrétienne a un sens positif. " Pour moi, la vie c’est le Christ et mourir un gain " (Ph 1, 21). " C’est là une parole certaine : si nous mourons avec lui, nous vivrons avec lui " (2 Tm 2, 11). La nouveauté essentielle de la mort chrétienne est là : par le Baptême, le chrétien est déjà sacramentellement " mort avec le Christ ", pour vivre d’une vie nouvelle ; et si nous mourons dans la grâce du Christ, la mort physique consomme ce " mourir avec le Christ " et achève ainsi notre incorporation à Lui dans son acte rédempteur :
Il est bon pour moi de mourir dans (eis) le Christ Jésus, plus que de régner sur les extrémités de la terre. C’est lui que je cherche, qui est mort pour nous ; lui que je veux, qui est ressuscité pour nous. Mon enfantement approche (...). Laissez-moi recevoir la pure lumière ; quand je serai arrivé là, je serai un homme (S. Ignace d’Antioche, Rom. 6, 1-2).
1011. Dans la mort, Dieu appelle l’homme vers Lui. C’est pourquoi le chrétien peut éprouver envers la mort un désir semblable à celui de S. Paul : " J’ai le désir de m’en aller et d’être avec le Christ " (Ph 1, 23) ; et il peut transformer sa propre mort en un acte d’obéissance et d’amour envers le Père, à l’exemple du Christ (cf. Lc 23, 46) :
Mon désir terrestre a été crucifié ; (...) il y a en moi une eau vive qui murmure et qui dit au dedans de moi " Viens vers le Père " (S. Ignace d’Antioche, Rom. 7, 2).
Je veux voir Dieu, et pour le voir il faut mourir (Ste. Thérèse de Jésus, vida 1).
Je ne meurs pas, j’entre dans la vie (Ste. Thérèse de l’Enfant-Jésus, verba).
1012. La vision chrétienne de la mort (cf. 1 Th 4, 13-14) est exprimée de façon privilégiée dans la liturgie de l’Église :
Pour tous ceux qui croient en toi, Seigneur, la vie n’est pas détruite, elle est transformée ; et lorsque prend fin leur séjour sur la terre, ils ont déjà une demeure éternelle dans les cieux (MR, Préface des défunts).
1013. La mort est la fin du pèlerinage terrestre de l’homme, du temps de grâce et de miséricorde que Dieu lui offre pour réaliser sa vie terrestre selon le dessein divin et pour décider son destin ultime. Quand a pris fin " l’unique cours de notre vie terrestre " (LG 48), nous ne reviendrons plus à d’autres vies terrestres. " Les hommes ne meurent qu’une fois " (He 9, 27). Il n’y a pas de " réincarnation " après la mort.
1014. L’Église nous encourage à nous préparer pour l’heure de notre mort (" Délivre-nous, Seigneur, d’une mort subite et imprévue " : ancienne Litanie des saints), à demander à la Mère de Dieu d’intercéder pour nous " à l’heure de notre mort " (Prière Ave Maria), et à nous confier à saint Joseph, patron de la bonne mort :
Dans toutes tes actions, dans toutes tes pensées tu devrais te comporter comme si tu devais mourir aujourd’hui. Si ta conscience était en bon état, tu ne craindrais pas beaucoup la mort. Il vaudrait mieux se garder de pécher que de fuir la mort. Si aujourd’hui tu n’es pas prêt, comment le seras-tu demain ? (Imitation du Christ 1, 23, 1).
Loué sois-tu, mon Seigneur, pour sœur notre mort corporelle, à qui nul homme vivant ne peut échapper. Malheur à ceux qui mourront dans les péchés mortels, heureux ceux qu’elle trouvera dans ses très saintes volontés, car la seconde mort ne leur fera pas mal (S. François d’Assise, cant.).
1036. Les affirmations de la Sainte Écriture et les enseignements de l’Église au sujet de l’enfer sont un appel à la responsabilité avec laquelle l’homme doit user de sa liberté en vue de son destin éternel. Elles constituent en même temps un appel pressant à la conversion : " Entrez par la porte étroite. Car large et spacieux est le chemin qui mène à la perdition, et il en est beaucoup qui le prennent ; mais étroite est la porte et resserré le chemin qui mène à la Vie, et il en est peu qui le trouvent " (Mt 7, 13-14) :
Ignorants du jour et de l’heure, il faut que, suivant l’avertissement du Seigneur, nous restions constamment vigilants pour mériter, quand s’achèvera le cours unique de notre vie terrestre, d’être admis avec lui aux noces et comptés parmi les bénis de Dieu, au lieu d’être, comme de mauvais et paresseux serviteurs, écartés par l’ordre de Dieu vers le feu éternel, vers ces ténèbres du dehors où seront les pleurs et les grincements de dents (LG 48).
1037. Dieu ne prédestine personne à aller en enfer (cf. DS 397 ; 1567) ; il faut pour cela une aversion volontaire de Dieu (un péché mortel), et y persister jusqu’à la fin. Dans la liturgie eucharistique et dans les prières quotidiennes de ses fidèles, l’Église implore la miséricorde de Dieu, qui veut " que personne ne périsse, mais que tous arrivent au repentir " (2 P 3, 9) :
Voici l’offrande que nous présentons devant toi, nous, tes serviteurs, et ta famille entière : dans ta bienveillance, accepte-la. Assure toi-même la paix de notre vie, arrache-nous à la damnation et reçois-nous parmi tes élus (MR, Canon Romain 88).
1262. Les différents effets du Baptême sont signifiés par les éléments sensibles du rite sacramentel. La plongée dans l’eau fait appel aux symbolismes de la mort et de la purification, mais aussi de la régénération et du renouvellement. Les deux effets principaux sont donc la purification des péchés et la nouvelle naissance dans l’Esprit Saint (cf. Ac 2, 38 ; Jn 3, 5).
1263. Pour la rémission des péchés ...
Par le Baptême, tous les péchés sont remis, le péché originel et tous les péchés personnels ainsi que toutes les peines du péché (cf. DS 1316). En effet, en ceux qui ont été régénérés il ne demeure rien qui les empêcherait d’entrer dans le Royaume de Dieu, ni le péché d’Adam, ni le péché personnel, ni les suites du péché, dont la plus grave est la séparation de Dieu.
1264. Dans le baptisé, certaines conséquences temporelles du péché demeurent cependant, tels les souffrances, la maladie, la mort, ou les fragilités inhérentes à la vie comme les faiblesses de caractère, etc., ainsi qu’une inclination au péché que la Tradition appelle la concupiscence, ou, métaphoriquement, " le foyer du péché " (fomes peccati) : " Laissée pour nos combats, la concupiscence n’est pas capable de nuire à ceux qui, n’y consentant pas, résistent avec courage par la grâce du Christ. Bien plus, ‘celui qui aura combattu selon les règles sera couronné’ (2 Tm 2, 5) " (Cc. Trente : DS 1515).
1265. Le Baptême ne purifie pas seulement de tous les péchés, il fait aussi du néophyte " une création nouvelle " (2 Co 5, 17), un fils adoptif de Dieu (cf. Ga 4, 5-7) qui est devenu " participant de la nature divine " (2 P 1, 4), membre du Christ (cf. 1 Co 6, 15 ; 12, 27) et cohéritier avec Lui (Rm 8, 17), temple de l’Esprit Saint (cf. 1 Co 6, 19).
1266. La Très Sainte Trinité donne au baptisé la grâce sanctifiante, la grâce de la justification qui
– le rend capable de croire en Dieu, d’espérer en Lui et de L’aimer par les vertus théologales ;
– lui donne de pouvoir vivre et agir sous la motion de l’Esprit Saint par les dons du Saint-Esprit ;
– lui permet de croître dans le bien par les vertus morales.
Ainsi, tout l’organisme de la vie surnaturelle du chrétien a sa racine dans le saint Baptême.
1267. Incorporés à l’Église, Corps du Christ
Le Baptême fait de nous des membres du Corps du Christ. " Dès lors, ... ne sommes-nous pas membres les uns des autres ? " (Ep 4, 25). Le Baptême incorpore à l’Église. Des fonts baptismaux naît l’unique peuple de Dieu de la Nouvelle Alliance qui dépasse toutes les limites naturelles ou humaines des nations, des cultures, des races et des sexes : " Aussi bien est-ce en un seul Esprit que nous tous avons été baptisés pour ne former qu’un seul corps " (1 Co 12, 13).
1268. Les baptisés sont devenus des " pierres vivantes " pour " l’édification d’un édifice spirituel, pour un sacerdoce saint " (1 P 2, 5). Par le Baptême ils participent au sacerdoce du Christ, à sa mission prophétique et royale, ils sont " une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis pour annoncer les louanges de Celui qui (les) a appelés des ténèbres à son admirable lumière " (1 P 2, 9). Le Baptême donne part au sacerdoce commun des fidèles.
1269. Devenu membre de l’Église, le baptisé n’appartient plus à lui-même (1 Co 6, 19), mais à Celui qui est mort et ressuscité pour nous (cf. 2 Co 5, 15). Dès lors il est appelé à se soumettre aux autres (cf. Ep 5, 21 ; 1 Co 16, 15-16), à les servir (cf. Jn 13, 12-15) dans la communion de l’Église, et à être " obéissant et docile " aux chefs de l’Église (He 13, 17) et à les considérer avec respect et affection (cf. 1 Th 5, 12-13). De même que le Baptême est la source de responsabilités et de devoirs, le baptisé jouit aussi de droits au sein de l’Église : à recevoir les sacrements, à être nourri avec la parole de Dieu et à être soutenu par les autres aides spirituelles de l’Église. (cf. LG 37 ; CIC, can. 208-223 ; CCEO, can. 675, 2).
1270. " Devenus fils de Dieu par la régénération [baptismale], (les baptisés) sont tenus de professer devant les hommes la foi que par l’Église ils ont reçue de Dieu " (LG 11) et de participer à l’activité apostolique et missionnaire du Peuple de Dieu (cf. LG 17 ; AG 7, 23).
1271. Le lien sacramentel de l’unité des chrétiens
Le Baptême constitue le fondement de la communion entre tous les chrétiens, aussi avec ceux qui ne sont pas encore en pleine communion avec l’Église catholique : " En effet, ceux qui croient au Christ et qui ont reçu validement le Baptême, se trouvent dans une certaine communion, bien qu’imparfaite, avec l’Église catholique ... Justifiés par la foi reçue au Baptême, incorporés au Christ, ils portent à juste titre le nom de chrétiens, et les fils de l’Église catholique les reconnaissent à bon droit comme des frères dans le Seigneur " (UR 3). " Le Baptême est donc le lien sacramentel d’unité existant entre ceux qui ont été régénérés par lui " (UR 22).
1272. Une marque spirituelle indélébile...
Incorporé au Christ par le Baptême, le baptisé est configuré au Christ (cf. Rm 8, 29). Le Baptême scelle le chrétien d’une marque spirituelle indélébile (" character ") de son appartenance au Christ. Cette marque n’est effacée par aucun péché, même si le péché empêche le Baptême de porter des fruits de salut (cf. DS 1609-1619). Donné une fois pour toutes, le Baptême ne peut pas être réitéré.
1273. Incorporés à l’Église par le Baptême, les fidèles ont reçu le caractère sacramentel qui les consacre pour le culte religieux chrétien (cf. LG 11). Le sceau baptismal rend capable et engage les chrétiens à servir Dieu dans une participation vivante à la sainte Liturgie de l’Église et à exercer leur sacerdoce baptismal par le témoignage d’une vie sainte et d’une charité efficace (cf. LG 10).
1274. Le " sceau du Seigneur " (" Dominicus character " : S. Augustin, ep. 98, 5: PL 33, 362) est le sceau dont l’Esprit Saint nous a marqués " pour le jour de la rédemption " (Ep 4, 30 ; cf. Ep 1, 13-14 ; 2 Co 1, 21-22). " Le Baptême, en effet, est le sceau de la vie éternelle " (S. Irénée, dem. 3). Le fidèle qui aura " gardé le sceau " jusqu’au bout, c’est-à-dire qui sera resté fidèle aux exigences de son Baptême, pourra s’en aller " marqué du signe de la foi " (MR, Canon Romain 97), avec la foi de son Baptême, dans l’attente de la vision bienheureuse de Dieu – consommation de la foi – et dans l’espérance de la résurrection.
1368. L’Eucharistie est également le sacrifice de l’Église. L’Église, qui est le Corps du Christ, participe à l’offrande de son Chef. Avec Lui, elle est offerte elle-même tout entière. Elle s’unit à son intercession auprès du Père pour tous les hommes. Dans l’Eucharistie, le sacrifice du Christ devient aussi le sacrifice des membres de son Corps. La vie des fidèles, leur louange, leur souffrance, leur prière, leur travail, sont unis à ceux du Christ et à sa totale offrande, et acquièrent ainsi une valeur nouvelle. Le sacrifice du Christ présent sur l’autel donne à toutes les générations de chrétiens la possibilité d’être unis à son offrande.
Dans les catacombes, l’Église est souvent représentée comme une femme en prière, les bras largement ouverts en attitude d’orante. Comme le Christ qui a étendu les bras sur la croix, par lui, avec lui et en lui, elle s’offre et intercède pour tous les hommes.
1369. Toute l’Église est unie à l’offrande et à l’intercession du Christ. Chargé du ministère de Pierre dans l’Église, le Pape est associé à toute célébration de l’Eucharistie où il est nommé comme signe et serviteur de l’unité de l’Église Universelle. L’évêque du lieu est toujours responsable de l’eucharistie, même lorsqu’elle est présidée par un prêtre ; son nom y est prononcé pour signifier sa présidence de l’Église particulière, au milieu du presbyterium et avec l’assistance des diacres. La communauté intercède aussi pour tous les ministres qui, pour elle et avec elle, offrent le sacrifice eucharistique :
Que cette eucharistie seule soit regardée comme légitime, qui se fait sous la présidence de l’évêque ou de celui qu’il en a chargé (S. Ignace d’Antioche, Smyrn. 8, 1).
C’est par le ministère des prêtres que se consomme le sacrifice spirituel des chrétiens, en union avec le sacrifice du Christ, unique Médiateur, offert au nom de toute l’Église dans l’Eucharistie par les mains des prêtres, de manière non sanglante et sacramentelle, jusqu’à ce que vienne le Seigneur lui-même (PO 2).
1370. A l’offrande du Christ s’unissent non seulement les membres qui sont encore ici-bas, mais aussi ceux qui sont déjà dans la gloire du ciel : C’est en communion avec la très Sainte Vierge Marie et en faisant mémoire d’elle, ainsi que de tous les saints et toutes les saintes, que l’Église offre le sacrifice eucharistique. Dans l’Eucharistie l’Église, avec Marie, est comme au pied de la Croix, unie à l’offrande et à l’intercession du Christ.
1371. Le sacrifice eucharistique est aussi offert pour les fidèles défunts " qui sont morts dans le Christ et ne sont pas encore pleinement purifiés " (Cc. Trente : DS 1743), pour qu’ils puissent entrer dans la lumière et la paix du Christ :
Enterrez ce corps n’importe où ! Ne vous troublez pas pour lui d’aucun souci ! Tout ce que je vous demande, c’est de vous souvenir de moi à l’autel du Seigneur où que vous soyez " (S. Monique, avant sa mort, à S. Augustin et son frère ; conf. 9, 11, 27).
Ensuite, nous prions [dans l’anaphore] pour les saints pères et évêques endormis, et en général pour tous ceux qui se sont endormis avant nous, en croyant qu’il y aura très grand profit pour les âmes, en faveur desquelles la supplication est offerte, tandis que se trouve présente la sainte et si redoutable victime... En présentant à Dieu nos supplications pour ceux qui se sont endormis, fussent-ils pécheurs, nous ... présentons le Christ immolé pour nos péchés, rendant propice, pour eux et pour nous, le Dieu ami des hommes (S. Cyrille de Jérusalem, catech. myst. 5, 9. 10 : PG 33, 1116B-1117A).
1372. S. Augustin a admirablement résumé cette doctrine qui nous incite à une participation de plus en plus complète au sacrifice de notre Rédempteur que nous célébrons dans l’Eucharistie :
Cette cité rachetée tout entière, c’est-à-dire l’assemblée et la société des saints, est offerte à Dieu comme un sacrifice universel par le Grand Prêtre qui, sous la forme d’esclave, est allé jusqu’à s’offrir pour nous dans sa passion, pour faire de nous le corps d’un si grand Chef ... Tel est le sacrifice des chrétiens : " à plusieurs, n’être qu’un seul corps dans le Christ " (Rm 12, 5). Et ce sacrifice, l’Église ne cesse de le reproduire dans le Sacrement de l’autel bien connu des fidèles, où il lui est montré que dans ce qu’elle offre, elle est elle-même offerte (S. Augustin, civ. 10, 6).
1385. Pour répondre à cette invitation, nous devons nous préparer à ce moment si grand et si saint. S. Paul exhorte à un examen de conscience : " Quiconque mange ce pain ou boit cette coupe du Seigneur indignement aura à répondre du Corps et du Sang du Seigneur. Que chacun donc s’éprouve soi-même et qu’il mange alors de ce pain et boive de cette coupe ; car celui qui mange et boit, mange et boit sa propre condamnation, s’il n’y discerne le Corps " (1 Co 11, 27-29). Celui qui est conscient d’un péché grave doit recevoir le sacrement de la Réconciliation avant d’accéder à la communion.
1386. Devant la grandeur de ce sacrement, le fidèle ne peut que reprendre humblement et avec une foi ardente la parole du Centurion (cf. Mt 8, 8) : " Domine, non sum dignus, ut intres sub tectum meum, sed tantum dic verbum, et sanabitur anima mea " (" Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri "). Et dans la Divine Liturgie de S. Jean Chrysostome, les fidèles prient dans le même esprit :
A ta cène mystique fais-moi communier aujourd’hui, ô Fils de Dieu. Car je ne dirai pas le Secret à tes ennemis, ni ne te donnerai le baiser de Judas. Mais, comme le larron, je te crie : Souviens-toi de moi, Seigneur, dans ton royaume.
1387. Pour se préparer convenablement à recevoir ce sacrement, les fidèles observeront le jeûne prescrit dans leur Église (cf. CIC, can. 919). L’attitude corporelle (gestes, vêtement) traduira le respect, la solennité, la joie de ce moment où le Christ devient notre hôte.
1388. Il est conforme au sens même de l’Eucharistie que les fidèles, s’ils ont les dispositions requises (cf. CIC 916), communient quand ils participent à la messe (Dans la même journée, les fidèles peuvent recevoir la très Sainte Communion deux fois, et seulement deux fois [cf. Pontificia Commissio Codicis Iuris Canonici authentice interpretando, Responsa ad proposita dubia, 1 : AAS 76 (1984), p. 746]) : " Il est vivement recommandé aux fidèles de participer à la Messe de façon plus parfaite en recevant aussi, après la communion du prêtre, le corps du Seigneur du même sacrifice " (SC 55).
1389. L’Église fait obligation aux fidèles de participer les dimanches et les jours de fête à la divine liturgie (cf. OE 15) et de recevoir au moins une fois par an l’Eucharistie, si possible au temps pascal (cf. CIC, can. 920), préparés par le sacrement de la Réconciliation. Mais l’Église recommande vivement aux fidèles de recevoir la sainte Eucharistie les dimanches et les jours de fête, ou plus souvent encore, même tous les jours.
1391. La communion accroît notre union au Christ. Recevoir l’Eucharistie dans la communion porte comme fruit principal l’union intime au Christ Jésus. Le Seigneur dit en effet : " Qui mange ma Chair et boit mon Sang demeure en moi et moi en lui " (Jn 6, 56). La vie en Christ trouve son fondement dans le banquet eucharistique : " De même qu’envoyé par le Père, qui est vivant, moi, je vis par le Père, de même, celui qui me mange, vivra, lui aussi, par moi " (Jn 6, 57) :
Lorsque dans les fêtes du Seigneur les fidèles reçoivent le Corps du Fils, ils proclament les uns aux autres la Bonne Nouvelle que les arrhes de la vie sont donnés, comme lorsque l’ange dit à Marie de Magdala : " Le Christ est ressuscité ! " Voici que maintenant aussi la vie et la résurrection sont conférées à celui qui reçoit le Christ (Fanqîth, Office syriaque d’Antioche, volume 1, Commun, 237a-b).
1392. Ce que l’aliment matériel produit dans notre vie corporelle, la communion le réalise de façon admirable dans notre vie spirituelle. La communion à la Chair du Christ ressuscité, " vivifiée par l’Esprit Saint et vivifiante " (PO 5), conserve, accroît et renouvelle la vie de grâce reçue au Baptême. Cette croissance de la vie chrétienne a besoin d’être nourrie par la communion eucharistique, pain de notre pèlerinage, jusqu’au moment de la mort, où il nous sera donné comme viatique.
1393. La communion nous sépare du péché. Le Corps du Christ que nous recevons dans la communion est " livré pour nous ", et le Sang que nous buvons, est " versé pour la multitude en rémission des péchés ". C’est pourquoi l’Eucharistie ne peut pas nous unir au Christ sans nous purifier en même temps des péchés commis et nous préserver des péchés futurs :
" Chaque fois que nous le recevons, nous annonçons la mort du Seigneur " (1 Co 11, 26). Si nous annonçons la mort du Seigneur, nous annonçons la rémission des péchés. Si, chaque fois que son Sang est répandu, il est répandu pour la rémission des péchés, je dois toujours le recevoir, pour que toujours il remette mes péchés. Moi qui pèche toujours, je dois avoir toujours un remède (S. Ambroise, sacr. 4, 28 : PL 16, 446A).
1394. Comme la nourriture corporelle sert à restaurer la perte des forces, l’Eucharistie fortifie la charité qui, dans la vie quotidienne, tend à s’affaiblir ; et cette charité vivifiée efface les péchés véniels (cf. Cc. Trente : DS 1638). En se donnant à nous, le Christ ravive notre amour et nous rend capables de rompre les attachements désordonnés aux créatures et de nous enraciner en Lui :
Puisque le Christ est mort pour nous par amour, lorsque nous faisons mémoire de sa mort au moment du sacrifice, nous demandons que l’amour nous soit accordé par la venue du Saint-Esprit ; nous prions humblement qu’en vertu de cet amour, par lequel le Christ a voulu mourir pour nous, nous aussi, en recevant la grâce du Saint-Esprit, nous puissions considérer le monde comme crucifié pour nous, et être nous-mêmes crucifiés pour le monde... Ayant reçu le don de l’amour, mourons au péché et vivons pour Dieu (S. Fulgence de Ruspe, Fab. 28, 16-19 : CCL 19A, 813-814 : LH, sem. 28, lundi, off. lect.).
1395. Par la même charité qu’elle allume en nous, l’Eucharistie nous préserve des péchés mortels futurs. Plus nous participons à la vie du Christ et plus nous progressons dans son amitié, plus il nous est difficile de rompre avec Lui par le péché mortel. L’Eucharistie n’est pas ordonnée au pardon des péchés mortels. Ceci est propre au sacrement de la Réconciliation. Le propre de l’Eucharistie est d’être le sacrement de ceux qui sont dans la pleine communion de l’Église.
1396. L’unité du Corps mystique : l’Eucharistie fait l’Église. Ceux qui reçoivent l’Eucharistie sont unis plus étroitement au Christ. Par là même, le Christ les unit à tous les fidèles en un seul corps : l’Église. La communion renouvelle, fortifie, approfondit cette incorporation à l’Église déjà réalisée par le Baptême. Dans le Baptême nous avons été appelés à ne faire qu’un seul corps (cf. 1 Co 12, 13). L’Eucharistie réalise cet appel : " La coupe de bénédiction que nous bénissons n’est-elle pas communion au Sang du Christ ? Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au Corps du Christ ? Puisqu’il n’y a qu’un pain, à nous tous nous ne formons qu’un corps, car tous nous avons part à ce pain unique " (1 Co 10, 16-17) :
Si vous êtes le corps du Christ et ses membres, c’est votre sacrement qui est placé sur la table du Seigneur, vous recevez votre sacrement. Vous répondez " Amen " (" oui, c’est vrai ! ") à ce que vous recevez, et vous y souscrivez en répondant. Tu entends ce mot : " le Corps du Christ " et tu réponds : " Amen ". Sois donc un membre du Christ pour que soit vrai ton Amen (S. Augustin, serm. 272 : PL 38, 1247).
1397. L’Eucharistie engage envers les pauvres : Pour recevoir dans la vérité le Corps et le Sang du Christ livrés pour nous, nous devons reconnaître le Christ dans les plus pauvres, Ses frères (cf. Mt 25, 40) :
Tu as goûté au sang du Seigneur et tu ne reconnais pas même ton frère. Tu déshonores cette table même, en ne jugeant pas digne de partager ta nourriture celui qui a été jugé digne de prendre part à cette table. Dieu t’a libéré de tous tes péchés et t’y a invité. Et toi, pas même alors, tu n’es devenu plus miséricordieux (S. Jean Chrysostome, hom. in 1 Cor. 27, 4 : PG 61, 229-230).
1420. Par les sacrements de l’initiation chrétienne, l’homme reçoit la vie nouvelle du Christ. Or, cette vie, nous la portons " en des vases d’argile " (2 Co 4, 7). Maintenant, elle est encore " cachée avec le Christ en Dieu " (Col 3, 3). Nous sommes encore dans " notre demeure terrestre " (2 Co 5, 1) soumise à la souffrance, à la maladie et à la mort. Cette vie nouvelle d’enfant de Dieu peut être affaiblie et même perdue par le péché.
1421. Le Seigneur Jésus-Christ, médecin de nos âmes et de nos corps, Lui qui a remis les péchés au paralytique et lui a rendu la santé du corps (cf. Mc 2, 1-12), a voulu que son Église continue, dans la force de l’Esprit Saint, son œuvre de guérison et de salut, même auprès de ses propres membres. C’est le but des deux sacrements de guérison : du sacrement de Pénitence et de l’Onction des malades.
1426. La conversion au Christ, la nouvelle naissance du Baptême, le don de l’Esprit Saint, le Corps et le Sang du Christ reçus en nourriture, nous ont rendu " saints et immaculés devant lui " (Ep 1, 4), comme l’Église elle-même, épouse du Christ, est " sainte et immaculée devant lui " (Ep 5, 27). Cependant, la vie nouvelle reçue dans l’initiation chrétienne n’a pas supprimé la fragilité et la faiblesse de la nature humaine, ni l’inclination au péché que la tradition appelle la concupiscence, qui demeure dans les baptisés pour qu’ils fassent leurs preuves dans le combat de la vie chrétienne aidés par la grâce du Christ (cf. DS 1515). Ce combat est celui de la conversion en vue de la sainteté et de la vie éternelle à laquelle le Seigneur ne cesse de nous appeler (cf. DS 1545 ; LG 40).
1425. II. Pourquoi un sacrement de la réconciliation après le Baptême ?
" Vous avez été lavés, vous avez été sanctifiés, vous avez été justifiés au nom du Seigneur Jésus Christ et par l’Esprit de notre Dieu " (1 Co 6,11). Il faut se rendre compte de la grandeur du don de Dieu qui nous est fait dans les sacrements de l’initiation chrétienne pour saisir à quel point le péché est une chose exclue pour celui qui a " revêtu le Christ " (Ga 3, 27). Mais l’apôtre saint Jean dit aussi : " Si nous disons que nous sommes sans péché, nous nous abusons nous-mêmes, et la vérité n’est point en nous " (1 Jn 1,8). Et le Seigneur lui-même nous a enseigné de prier : " Pardonne-nous nos offenses " (Lc 11,4) en liant le pardon mutuel de nos offenses au pardon que Dieu accordera à nos péchés.
1426. La conversion au Christ, la nouvelle naissance du Baptême, le don de l’Esprit Saint, le Corps et le Sang du Christ reçus en nourriture, nous ont rendu " saints et immaculés devant lui " (Ep 1, 4), comme l’Église elle-même, épouse du Christ, est " sainte et immaculée devant lui " (Ep 5, 27). Cependant, la vie nouvelle reçue dans l’initiation chrétienne n’a pas supprimé la fragilité et la faiblesse de la nature humaine, ni l’inclination au péché que la tradition appelle la concupiscence, qui demeure dans les baptisés pour qu’ils fassent leurs preuves dans le combat de la vie chrétienne aidés par la grâce du Christ (cf. DS 1515). Ce combat est celui de la conversion en vue de la sainteté et de la vie éternelle à laquelle le Seigneur ne cesse de nous appeler (cf. DS 1545 ; LG 40).
1484. " La confession individuelle et intégrale suivie de l’absolution demeure le seul mode ordinaire par lequel les fidèles se réconcilient avec Dieu et l’Église, sauf si une impossibilité physique ou morale dispense d’une telle confession " (OP 31). Ceci n’est pas sans raisons profondes. Le Christ agit en chacun des sacrements. Il s’adresse personnellement à chacun des pécheurs : " Mon enfant, tes péchés sont remis " (Mc 2, 5) ; il est le médecin qui se penche sur chacun des malades qui ont besoin de lui (cf. Mc 2, 17) pour les guérir ; il les relève et les réintègre dans la communion fraternelle. La confession personnelle est donc la forme la plus significative de la réconciliation avec Dieu et avec l’Église.
1485. " Le soir de Pâques, le Seigneur Jésus se montra à ses Apôtres et leur dit : ‘Recevez l’Esprit Saint. Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis. Ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus’ " (Jn 20, 22-23).
1430. Comme déjà chez les prophètes, l’appel de Jésus à la conversion et à la pénitence ne vise pas d’abord des œuvres extérieures, " le sac et la cendre ", les jeûnes et les mortifications, mais la conversion du cœur, la pénitence intérieure. Sans elle, les œuvres de pénitence restent stériles et mensongères ; par contre, la conversion intérieure pousse à l’expression de cette attitude en des signes visibles, des gestes et des œuvres de pénitence (cf. Jl 2, 12-13 ; Is 1, 16-17 ; Mt 6, 1-6. 16-18).
1431. La pénitence intérieure est une réorientation radicale de toute la vie, un retour, une conversion vers Dieu de tout notre cœur, une cessation du péché, une aversion du mal, avec une répugnance envers les mauvaises actions que nous avons commises. En même temps, elle comporte le désir et la résolution de changer de vie avec l’espérance de la miséricorde divine et la confiance en l’aide de sa grâce. Cette conversion du cœur est accompagnée d’une douleur et d’une tristesse salutaires que les Pères ont appelées animi cruciatus (affliction de l’esprit), compunctio cordis (repentir du cœur) (cf. Cc. Trente : DS 1677-1678 ; 1705 ; Catech. R. 2, 5, 4).
1432. Le cœur de l’homme est lourd et endurci. Il faut que Dieu donne à l’homme un cœur nouveau (cf. Ez 36, 26-27). La conversion est d’abord une œuvre de la grâce de Dieu qui fait revenir nos cœurs à lui : " Convertis-nous, Seigneur, et nous serons convertis " (Lm 5, 21). Dieu nous donne la force de commencer à nouveau. C’est en découvrant la grandeur de l’amour de Dieu que notre cœur est ébranlé par l’horreur et le poids du péché et qu’il commence à craindre d’offenser Dieu par le péché et d’être séparé de lui. Le cœur humain se convertit en regardant vers Celui que nos péchés ont transpercé (cf. Jn 19, 37 ; Za 12, 10) :
Ayons les yeux fixés sur le sang du Christ et comprenons combien il est précieux à son Père car, répandu pour notre salut, il a ménagé au monde entier la grâce du repentir (S. Clément de Rome, Cor. 7,4).
1433. Depuis Pâques, c’est l’Esprit Saint qui " confond " le monde en matière de péché " (Jn 16, 8-9), à savoir que le monde n’a pas cru en Celui que le Père a envoyé. Mais ce même Esprit, qui dévoile le péché, est le Consolateur (cf. Jn 15, 26) qui donne au cœur de l’homme la grâce du repentir et de la conversion (cf. Ac 2, 36-38 ; cf. Jean-Paul II, DeV 27-48).
V. Les multiples formes de la pénitence dans la vie chrétienne
1450. " La Pénitence oblige le pécheur à accepter volontiers tous ses éléments : dans son cœur, la contrition ; dans sa bouche, la confession ; dans son comportement, une totale humilité ou une fructueuse satisfaction " (Catech. R. 2, 5, 21 ; cf. Cc. Trente : DS 1673).
1451. Parmi les actes du pénitent, la contrition vient en premier lieu. Elle est " une douleur de l’âme et une détestation du péché commis avec la résolution de ne plus pécher à l’avenir " (Cc. Trente : DS 1676).
1452. Quand elle provient de l’amour de Dieu aimé plus que tout, la contrition est appelée " parfaite " (contrition de charité). Une telle contrition remet les fautes vénielles ; elle obtient aussi le pardon des péchés mortels, si elle comporte la ferme résolution de recourir dès que possible à la confession sacramentelle (cf. Cc. Trente : DS 1677)
1453. La contrition dite " imparfaite " (ou " attrition ") est, elle aussi, un don de Dieu, une impulsion de l’Esprit Saint. Elle naît de la considération de la laideur du péché ou de la crainte de la damnation éternelle et des autres peines dont est menacé le pécheur (contrition par crainte). Un tel ébranlement de la conscience peut amorcer une évolution intérieure qui sera parachevée sous l’action de la grâce, par l’absolution sacramentelle. Par elle-même, cependant, la contrition imparfaite n’obtient pas le pardon des péchés graves, mais elle dispose à l’obtenir dans le sacrement de la Pénitence (cf. Cc. Trente : DS 1678 ; 1705).
1454. Il convient de préparer la réception de ce sacrement par un examen de conscience fait à la lumière de la Parole de Dieu. Les textes les plus adaptés à cet effet sont à chercher dans le Décalogue et dans la catéchèse morale des Évangiles et des lettres apostoliques : Sermon sur la montagne, les enseignements apostoliques (cf. Rm 12-15 ; 1 Co 12-13 ; Ga 5 ; Ep 4-6).
1455. La confession des péchés (l’aveu), même d’un point de vue simplement humain, nous libère et facilite notre réconciliation avec les autres. Par l’aveu, l’homme regarde en face les péchés dont il s’est rendu coupable ; il en assume la responsabilité et par là, il s’ouvre de nouveau à Dieu et à la communion de l’Église afin de rendre possible un nouvel avenir.
1456. L’aveu au prêtre constitue une partie essentielle du sacrement de Pénitence : " Les pénitents doivent, dans la confession, énumérer tous les péchés mortels dont ils ont conscience après s’être examinés sérieusement, même si ces péchés sont très secrets et s’ils ont été commis seulement contre les deux derniers préceptes du Décalogue (cf. Ex 20, 17 ; Mt 5, 28), car parfois ces péchés blessent plus grièvement l’âme et sont plus dangereux que ceux qui ont été commis au su de tous " (Cc. Trente : DS 1680) :
Lorsque les fidèles du Christ s’efforcent de confesser tous les péchés qui leur viennent à la mémoire, on ne peut pas douter qu’ils les présentent tous au pardon de la miséricorde divine. Ceux qui agissent autrement et qui en cachent sciemment quelques-uns ne proposent à la bonté divine rien qu’elle puisse remettre par l’intermédiaire du prêtre. Car " si le malade rougit de découvrir sa plaie au médecin, la médecine ne soigne pas ce qu’elle ignore " (S. Jérôme, Eccl. 10, 11 : PL 23, 1096) (Cc. Trente : DS 1680).
1457. D’après le commandement de l’Église, " tout fidèle parvenu à l’âge de la discrétion doit confesser au moins une fois par an, les péchés graves dont il a conscience " (DS 1683 ; cf. DS 1708 ; CIC, can. 989). Celui qui a conscience d’avoir commis un péché mortel ne doit pas recevoir la Sainte Communion, même s’il éprouve une grande contrition, sans avoir préalablement reçu l’absolution sacramentelle (cf. Cc. Trente : DS 1647 ; 1661), à moins qu’il n’ait un motif grave pour communier et qu’il ne lui soit possible d’accéder à un confesseur (cf. CIC, can. 916 ; CCEO, can. 711). Les enfants doivent accéder au sacrement de la Pénitence avant de recevoir pour la première fois la Sainte. Communion (cf. CIC, can. 914).
1458. Sans être strictement nécessaire, la confession des fautes quotidiennes (péchés véniels) est néanmoins vivement recommandée par l’Église (cf. Cc. Trente : DS 1680 ; CIC, can. 988, § 2 ). En effet, la confession régulière de nos péchés véniels nous aide à former notre conscience, à lutter contre nos penchants mauvais, à nous laisser guérir par le Christ, à progresser dans la vie de l’Esprit. En recevant plus fréquemment par ce sacrement, le don de la miséricorde du Père, nous sommes poussés à être miséricordieux comme lui (cf. Lc 6, 36) :
Celui qui confesse ses péchés agit déjà avec Dieu. Dieu accuse tes péchés ; si tu les accuses toi aussi, tu te joins à Dieu. L’homme et le pécheur sont pour ainsi dire deux réalités : quand tu entends parler de l’homme, c’est Dieu qui l’a fait ; quand tu entends parler du pécheur, c’est l’homme lui-même qui l’a fait. Détruis ce que tu as fais pour que Dieu sauve ce qu’il a fait... Quand tu commences à détester ce que tu as fait, c’est alors que tes œuvres bonnes commencent parce que tu accuses tes œuvres mauvaises. Le commencement des œuvres bonnes, c’est la confession des œuvres mauvaises. Tu fais la vérité et tu viens à la Lumière (S. Augustin, ev. Jo. 12, 13).
1459. Beaucoup de péchés causent du tort au prochain. Il faut faire le possible pour le réparer (par exemple restituer des choses volées, rétablir la réputation de celui qui a été calomnié, compenser des blessures). La simple justice exige cela. Mais en plus, le péché blesse et affaiblit le pécheur lui-même, ainsi que ses relations avec Dieu et avec le prochain. L’absolution enlève le péché, mais elle ne remédie pas à tous les désordres que le péché a causés (cf. Cc. Trente : DS 1712). Relevé du péché, le pécheur doit encore recouvrer la pleine santé spirituelle. Il doit donc faire quelque chose de plus pour réparer ses péchés : il doit " satisfaire " de manière appropriée ou " expier " ses péchés. Cette satisfaction s’appelle aussi " pénitence ".
1460. La pénitence que le confesseur impose, doit tenir compte de la situation personnelle du pénitent et doit chercher son bien spirituel. Elle doit correspondre autant que possible à la gravité et à la nature des péchés commis. Elle peut consister dans la prière, une offrande, dans les œuvres de miséricorde, le service du prochain, dans des privations volontaires, des sacrifices, et surtout dans l’acceptation patiente de la croix que nous devons porter. De telles pénitences aident à nous configurer au Christ qui, seul, a expié pour nos péchés (cf. Rm 3, 25 ; 1 Jn 2, 1-2) une fois pour toutes. Elles nous permettent de devenir les cohéritiers du Christ ressuscité, " puisque nous souffrons avec lui " (Rm 8, 17 ; cf. Cc. Trente : DS 1690) :
Mais notre satisfaction, celle que nous acquittons pour nos péchés, n’est que par Jésus-Christ : nous qui, de nous mêmes comme tels, ne pouvons rien nous-mêmes, avec l’aide " de celui qui nous fortifie, nous pouvons tout " (Ph 4, 13). Ainsi l’homme n’a rien dont il puisse se glorifier, mais toute notre " gloire " est dans le Christ... en qui nous satisfaisons, " en faisant de dignes fruits de pénitence " (Lc 3, 8), qui en Lui puisent leur force, par Lui sont offerts au Père et grâce à Lui sont acceptés par le Père (Cc. Trente : DS 1691).
1456. L’aveu au prêtre constitue une partie essentielle du sacrement de Pénitence : " Les pénitents doivent, dans la confession, énumérer tous les péchés mortels dont ils ont conscience après s’être examinés sérieusement, même si ces péchés sont très secrets et s’ils ont été commis seulement contre les deux derniers préceptes du Décalogue (cf. Ex 20, 17 ; Mt 5, 28), car parfois ces péchés blessent plus grièvement l’âme et sont plus dangereux que ceux qui ont été commis au su de tous " (Cc. Trente : DS 1680) :
Lorsque les fidèles du Christ s’efforcent de confesser tous les péchés qui leur viennent à la mémoire, on ne peut pas douter qu’ils les présentent tous au pardon de la miséricorde divine. Ceux qui agissent autrement et qui en cachent sciemment quelques-uns ne proposent à la bonté divine rien qu’elle puisse remettre par l’intermédiaire du prêtre. Car " si le malade rougit de découvrir sa plaie au médecin, la médecine ne soigne pas ce qu’elle ignore " (S. Jérôme, Eccl. 10, 11 : PL 23, 1096) (Cc. Trente : DS 1680).
1457. D’après le commandement de l’Église, " tout fidèle parvenu à l’âge de la discrétion doit confesser au moins une fois par an, les péchés graves dont il a conscience " (DS 1683 ; cf. DS 1708 ; CIC, can. 989). Celui qui a conscience d’avoir commis un péché mortel ne doit pas recevoir la Sainte Communion, même s’il éprouve une grande contrition, sans avoir préalablement reçu l’absolution sacramentelle (cf. Cc. Trente : DS 1647 ; 1661), à moins qu’il n’ait un motif grave pour communier et qu’il ne lui soit possible d’accéder à un confesseur (cf. CIC, can. 916 ; CCEO, can. 711). Les enfants doivent accéder au sacrement de la Pénitence avant de recevoir pour la première fois la Sainte. Communion (cf. CIC, can. 914).
1458. Sans être strictement nécessaire, la confession des fautes quotidiennes (péchés véniels) est néanmoins vivement recommandée par l’Église (cf. Cc. Trente : DS 1680 ; CIC, can. 988, § 2 ). En effet, la confession régulière de nos péchés véniels nous aide à former notre conscience, à lutter contre nos penchants mauvais, à nous laisser guérir par le Christ, à progresser dans la vie de l’Esprit. En recevant plus fréquemment par ce sacrement, le don de la miséricorde du Père, nous sommes poussés à être miséricordieux comme lui (cf. Lc 6, 36) :
Celui qui confesse ses péchés agit déjà avec Dieu. Dieu accuse tes péchés ; si tu les accuses toi aussi, tu te joins à Dieu. L’homme et le pécheur sont pour ainsi dire deux réalités : quand tu entends parler de l’homme, c’est Dieu qui l’a fait ; quand tu entends parler du pécheur, c’est l’homme lui-même qui l’a fait. Détruis ce que tu as fais pour que Dieu sauve ce qu’il a fait... Quand tu commences à détester ce que tu as fait, c’est alors que tes œuvres bonnes commencent parce que tu accuses tes œuvres mauvaises. Le commencement des œuvres bonnes, c’est la confession des œuvres mauvaises. Tu fais la vérité et tu viens à la Lumière (S. Augustin, ev. Jo. 12, 13).
1463. Certains péchés particulièrement graves sont frappés de l’excommunication, la peine ecclésiastique la plus sévère, qui empêche le réception des sacrements et l’exercice de certains actes ecclésiastiques (cf. CIC, can. 1331 ; CCEO, can. 1431 ; 1434), et dont l’absolution, par conséquent, ne peut être accordée, selon le droit de l’Église, que par le Pape, l’évêque du lieu ou des prêtres autorisés par eux (cf. CIC, can. 1354-1357 ; CCEO, can. 1420). En cas de danger de mort tout prêtre, même dépourvu de la faculté d’entendre les confessions, peut absoudre de tout péché (cf. CIC, can. 976 ; CCEO, can. 725) et de toute excommunication.
1467. Étant donnée la délicatesse et la grandeur de ce ministère et le respect dû aux personnes, l’Église déclare que tout prêtre qui entend des confessions est obligé de garder un secret absolu au sujet des péchés que ses pénitents lui ont confessés, sous des peines très sévères (CIC, can. 1388, §1 ; CCEO, can. 1456). Il ne peut pas non plus faire état des connaissances que la confession lui donne sur la vie des pénitents. Ce secret, qui n’admet pas d’exceptions, s’appelle le " sceau sacramentel ", car ce que le pénitent a manifesté au prêtre reste " scellé " par le sacrement.
1499. " Par l’Onction sacrée des malades et la prière des prêtres, c’est l’Église toute entière qui recommande les malades au Seigneur souffrant et glorifié, pour qu’il les soulage et les sauve ; bien mieux, elle les exhorte, en s’associant librement à la passion et à la mort du Christ à apporter leur part pour le bien du peuple de Dieu " (LG 11).
1500. I. Ses fondements dans l’Economie du Salut
La maladie et la souffrance ont toujours été parmi les problèmes les plus graves qui éprouvent la vie humaine. Dans la maladie, l’homme fait l’expérience de son impuissance, de ses limites et de sa finitude. Toute maladie peut nous faire entrevoir la mort.
1501. La maladie peut conduire à l’angoisse, au repliement sur soi, parfois même au désespoir et à la révolte contre Dieu. Elle peut aussi rendre la personne plus mûre, l’aider à discerner dans sa vie ce qui n’est pas essentiel pour se tourner vers ce qui l’est. Très souvent, la maladie provoque une recherche de Dieu, un retour à Lui.
1502. L’homme de l’Ancien Testament vit la maladie en face de Dieu. C’est devant Dieu qu’il déverse sa plainte sur sa maladie (cf. Ps 38) et c’est de Lui, le Maître de la vie et de la mort, qu’il implore la guérison (cf. Ps 6, 3 ; Is 38). La maladie devient chemin de conversion (cf. Ps 38, 5 ; 39, 9. 12) et le pardon de Dieu inaugure la guérison (cf. Ps 32, 5 ; 107, 20 ; Mc 2, 5-12). Israël fait l’expérience que la maladie est, d’une façon mystérieuse, liée au péché et au mal, et que la fidélité à Dieu, selon sa Loi, rend la vie : " car c’est moi, le Seigneur, qui suis ton médecin " (Ex 15, 26). Le prophète entrevoit que la souffrance peut aussi avoir un sens rédempteur pour les péchés des autres (cf. Is 53, 11). Enfin, Isaïe annonce que Dieu amènera un temps pour Sion où il pardonnera toute faute et guérira toute maladie (cf. Is 33, 24).
1503. La compassion du Christ envers les malades et ses nombreuses guérisons d’infirmes de toute sorte (cf. Mt 4, 24) sont un signe éclatant de ce " que Dieu a visité son peuple " (Lc 7, 16) et que le Royaume de Dieu est tout proche. Jésus n’a pas seulement pouvoir de guérir, mais aussi de pardonner les péchés (cf. Mc 2, 5-12) : il est venu guérir l’homme tout entier, âme et corps ; il est le médecin dont les malades ont besoin (cf. Mc 2, 17). Sa compassion envers tous ceux qui souffrent va si loin qu’il s’identifie avec eux : " J’ai été malade et vous m’avez visité " (Mt 25, 36). Son amour de prédilection pour les infirmes n’a cessé, tout au long des siècles, d’éveiller l’attention toute particulière des chrétiens envers tous ceux qui souffrent dans leur corps et dans leur âme. Elle est à l’origine des efforts inlassables pour les soulager.
1504. Souvent Jésus demande aux malades de croire (cf. Mc 5, 34. 36 ; 9, 23). Il se sert de signes pour guérir : salive et imposition des mains (cf. Mc 7, 32-36 ; 8, 22-25), boue et ablution (cf. Jn 9, 6 s). Les malades cherchent à le toucher (cf. Mc 1, 41 ; 3, 10 ; 6, 56) " car une force sortait de lui qui les guérissait tous " (Lc 6, 19). Ainsi, dans les sacrements, le Christ continue à nous " toucher " pour nous guérir.
1505. Emu par tant de souffrances, le Christ non seulement se laisse toucher par les malades, mais il fait siennes leurs misères : " Il a pris nos infirmités et s’est chargé de nos maladies " (Mt 8, 17 ; cf. Is 53, 4). Il n’a pas guéri tous les malades. Ses guérisons étaient des signes de la venue du Royaume de Dieu. Ils annonçaient une guérison plus radicale : la victoire sur le péché et la mort par sa Pâque. Sur la Croix, le Christ a pris sur lui tout le poids du mal (cf. Is 53, 4-6) et a enlevé le " péché du monde " (Jn 1, 29), dont la maladie n’est qu’une conséquence. Par sa passion et sa mort sur la Croix, le Christ a donné un sens nouveau à la souffrance : elle peut désormais nous configurer à lui et nous unir à sa passion rédemptrice.
1659. S. Paul dit : " Maris, aimez vos femmes, comme le Christ a aimé l’Église... Ce mystère est de grande portée ; je veux dire qu’il s’applique au Christ et à l’Église " (Ep 5, 25. 32).
1660. L’alliance matrimoniale, par laquelle un homme et une femme constituent entre eux une intime communauté de vie et d’amour, a été fondée et dotée de ses lois propres par le Créateur. De par sa nature elle est ordonnée au bien des conjoints ainsi qu’à la génération et à l’éducation des enfants. Elle a été élevée entre baptisés par le Christ Seigneur à la dignité de sacrement (cf. GS 48, § 1 ; CIC, can. 1055, § 1).
1645. " L’égale dignité personnelle qu’il faut reconnaître à la femme et à l’homme dans l’amour plénier qu’ils se portent l’un à l’autre fait clairement apparaître l’unité du mariage, confirmée par le Seigneur " (GS 49, § 2). La polygamie est contraire à cette égale dignité et à l’amour conjugal qui est unique et exclusif (cf. FC 19).
1646. La fidélité de l’amour conjugal
L’amour conjugal exige des époux, de par sa nature même, une fidélité inviolable. Ceci est la conséquence du don d’eux-mêmes que se font l’un à l’autre les époux. L’amour veut être définitif. Il ne peut être " jusqu’à nouvel ordre ". " Cette union intime, don réciproque de deux personnes, non moins que le bien des enfants, exigent l’entière fidélité des époux et requièrent leur indissoluble unité " (GS 48, § 1).
1647. Le motif le plus profond se trouve dans la fidélité de Dieu à son alliance, du Christ à son Église. Par le sacrement de mariage les époux sont habilités à représenter cette fidélité et à en témoigner. Par le sacrement, l’indissolubilité du mariage reçoit un sens nouveau et plus profond.
1648. Il peut paraître difficile, voire impossible, de se lier pour la vie à un être humain. Il est d’autant plus important d’annoncer la bonne nouvelle que Dieu nous aime d’un amour définitif et irrévocable, que les époux ont part à cet amour, qu’il les porte et les soutient, et que par leur fidélité ils peuvent être les témoins de l’amour fidèle de Dieu. Les époux qui, avec la grâce de Dieu, donnent ce témoignage, souvent dans des conditions bien difficiles, méritent la gratitude et le soutien de la communauté ecclésiale (cf. FC 20).
1730. Dieu a créé l’homme raisonnable en lui conférant la dignité d’une personne douée de l’initiative et de la maîtrise de ses actes. " Dieu a ‘laissé l’homme à son propre conseil’ (Si 15, 14) pour qu’il puisse de lui-même chercher son Créateur et, en adhérant librement à Lui, parvenir à la pleine et bienheureuse perfection " (GS 17) :
L’homme est raisonnable, et par là semblable à Dieu, créé libre et maître de ses actes (S. Irénée, hær. 4, 4, 3).
1731. La liberté est le pouvoir, enraciné dans la raison et la volonté, d’agir ou de ne pas agir, de faire ceci ou cela, de poser ainsi par soi-même des actions délibérées. Par le libre arbitre chacun dispose de soi. La liberté est en l’homme une force de croissance et de maturation dans la vérité et la bonté. La liberté atteint sa perfection quand elle est ordonnée à Dieu, notre béatitude.
1732. Tant qu’elle ne s’est pas fixée définitivement dans son bien ultime qu’est Dieu, la liberté implique la possibilité de choisir entre le bien et le mal, donc celle de grandir en perfection ou de défaillir et de pécher. Elle caractérise les actes proprement humains. Elle devient source de louange ou de blâme, de mérite ou de démérite.
1733. Plus on fait le bien, plus on devient libre. Il n’y a de liberté vraie qu’au service du bien et de la justice. Le choix de la désobéissance et du mal est un abus de la liberté et conduit à " l’esclavage du péché " (cf. Rm 6, 17).
1739. II. La liberté humaine dans l’économie du salut
Liberté et péché. La liberté de l’homme est finie et faillible. De fait, l’homme a failli. Librement, il a péché. En refusant le projet d’amour de Dieu, il s’est trompé lui-même ; il est devenu esclave du péché. Cette aliénation première en a engendré une multitude d’autres. L’histoire de l’humanité, depuis ses origines, témoigne des malheurs et des oppressions nés du cœur de l’homme, par suite d’un mauvais usage de la liberté.
1740. Menaces pour la liberté. L’exercice de la liberté n’implique pas le droit de tout dire et de tout faire. Il est faux de prétendre que " l’homme, sujet de la liberté, se suffit à lui-même en ayant pour fin la satisfaction de son intérêt propre dans la jouissance des biens terrestres " (CDF, instr. " Libertatis conscientia " 13). Par ailleurs, les conditions d’ordre économique et social, politique et culturel requises pour un juste exercice de la liberté sont trop souvent méconnues et violées. Ces situations d’aveuglement et d’injustice grèvent la vie morale et placent aussi bien les forts que les faibles en tentation de pécher contre la charité. En s’écartant de la loi morale, l’homme porte atteinte à sa propre liberté, il s’enchaîne à lui-même, rompt la fraternité de ses semblables et se rebelle contre la vérité divine.
1741. Libération et salut. Par sa Croix glorieuse, le Christ a obtenu le salut de tous les hommes. Il les a rachetés du péché qui les détenait en esclavage. " C’est pour la liberté que le Christ nous a libérés " (Ga 5, 1). En Lui, nous communions à " la vérité qui nous rend libres " (Jn 8, 32). L’Esprit Saint nous a été donné et, comme l’enseigne l’Apôtre, " là où est l’Esprit, là est la liberté " (2 Co 3, 17). Dès maintenant, nous nous glorifions de la " liberté des enfants de Dieu " (Rm 8, 21).
1742. Liberté et grâce. La grâce du Christ ne se pose nullement en concurrente de notre liberté, quand celle-ci correspond au sens de la vérité et du bien que Dieu a placé dans le cœur de l’homme. Au contraire, comme l’expérience chrétienne en témoigne notamment dans la prière, plus nous sommes dociles aux impulsions de la grâce, plus s’accroissent notre liberté intime et notre assurance dans les épreuves, comme devant les pressions et les contraintes du monde extérieur. Par le travail de la grâce, l’Esprit Saint nous éduque à la liberté spirituelle pour faire de nous de libres collaborateurs de son œuvre dans l’Église et dans le monde :
Dieu qui es bon et tout-puissant, éloigne de nous ce qui nous arrête, afin que sans aucune entrave, ni d’esprit ni de corps, nous soyons libres pour accomplir ta volonté (MR, collecte du 32e dimanche).
1846. L’Evangile est la révélation, en Jésus Christ, de la miséricorde de Dieu pour les pécheurs (cf. Lc 15). L’ange l’annonce à Joseph : " Tu lui donneras le nom de Jésus : car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés " (Mt 1, 21). Il en va de même de l’Eucharistie, sacrement de la Rédemption : " Ceci est mon sang, le sang de l’Alliance, qui va être répandu pour une multitude en rémission des péchés " (Mt 26, 28).
1847. " Dieu nous a créés sans nous, il n’a pas voulu nous sauver sans nous " (S. Augustin, serm. 169, 11, 13 : PL 38, 923). L’accueil de sa miséricorde réclame de nous l’aveu de nos fautes. " Si nous disons : ‘Nous n’avons pas de péché’, nous nous abusons, la vérité n’est pas en nous. Si nous confessons nos péchés, Il est assez fidèle et juste pour remettre nos péchés et nous purifier de toute injustice " (1 Jn 1, 8-9).
1848. Comme l’affirme saint Paul : " Où le péché s’est multiplié, la grâce a surabondé ". Mais pour faire son œuvre, la grâce doit découvrir le péché pour convertir notre cœur et nous conférer " la justice pour la vie éternelle par Jésus Christ Notre Seigneur " (Rm 5, 20-21). Tel un médecin qui sonde la plaie avant de la panser, Dieu, par sa Parole et par son Esprit, projette une lumière vive sur le péché :
La conversion requiert la mise en lumière du péché, elle contient en elle-même le jugement intérieur de la conscience. On peut y voir la preuve de l’action de l’Esprit de vérité au plus profond de l’homme, et cela devient en même temps le commencement d’un nouveau don de la grâce et de l’amour : " Recevez l’Esprit Saint ". Ainsi, dans cette " mise en lumière du péché " nous découvrons un double don : le don de la vérité de la conscience et le don de la certitude de la rédemption. L’Esprit de vérité est le Consolateur (DeV 31).
1849. Le péché est une faute contre la raison, la vérité, la conscience droite ; il est un manquement à l’amour véritable, envers Dieu et envers le prochain, à cause d’un attachement pervers à certains biens. Il blesse la nature de l’homme et porte atteinte à la solidarité humaine. Il a été défini comme " une parole, un acte ou un désir contraires à la loi éternelle " (S. Augustin, Faust. 22, 27 : PL 42, 418 ; S. Thomas d’A., s. th. 1-2, 71, 6).
1850. Le péché est une offense de Dieu : " Contre toi, toi seul, j’ai péché. Ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait " (Ps 51, 6). Le péché se dresse contre l’amour de Dieu pour nous et en détourne nos cœurs. Comme le péché premier, il est une désobéissance, une révolte contre Dieu, par la volonté de devenir " comme des dieux ", connaissant et déterminant le bien et le mal (Gn 3, 5). Le péché est ainsi " amour de soi jusqu’au mépris de Dieu " (S. Augustin, civ. 14, 28). Par cette exaltation orgueilleuse de soi, le péché est diamétralement contraire à l’obéissance de Jésus qui accomplit le salut (cf. Ph 2, 6-9).
1851. C’est précisément dans la Passion où la miséricorde du Christ va le vaincre, que le péché manifeste le mieux sa violence et sa multiplicité : incrédulité, haine meurtrière, rejet et moqueries de la part des chefs et du peuple, lâcheté de Pilate et cruauté des soldats, trahison de Judas si dure à Jésus, reniement de Pierre et abandon des disciples. Cependant, à l’heure même des ténèbres et du Prince de ce monde (cf. Jn 14, 30), le sacrifice du Christ devient secrètement la source de laquelle jaillira intarissablement le pardon de nos péchés.
1852. La variété des péchés est grande. L’Écriture en fournit plusieurs listes. L’épître aux Galates oppose les œuvres de la chair au fruit de l’Esprit : " On sait bien tout ce que produit la chair : fornication, impureté, débauche, idolâtrie, magie, haines, discorde, jalousie, emportements, disputes, dissensions, scissions, sentiments d’envie, orgies, ripailles et choses semblables – et je vous préviens, comme je l’ai déjà fait, que ceux qui commettent ces fautes là n’hériteront pas du Royaume de Dieu " (5, 19-21 ; cf. Rm 1, 28-32 ; 1 Co 6, 9-10 ; Ep 5, 3-5 ; Col 3, 5-8 ; 1 Tm 1, 9-10 ; 2 Tm 3, 2-5).
1853. On peut distinguer les péchés selon leur objet, comme pour tout acte humain, ou selon les vertus auxquelles ils s’opposent, par excès ou par défaut, ou selon les commandements qu’ils contrarient. On peut les ranger aussi selon qu’ils concernent Dieu, le prochain ou soi-même ; on peut les diviser en péchés spirituels et charnels, ou encore en péchés en pensée, en parole, par action ou par omission. La racine du péché est dans le cœur de l’homme, dans sa libre volonté, selon l’enseignement du Seigneur : " Du cœur en effet procèdent mauvais desseins, meurtres, adultères, débauches, vols, faux témoignages, diffamations. Voilà les choses qui rendent l’homme impur " (Mt 15, 19). Dans le cœur réside aussi la charité, principe des œuvres bonnes et pures, que blesse le péché.
1854. IV. La gravité du péché : péché mortel et véniel
Il convient d’apprécier les péchés selon leur gravité. Déjà perceptible dans l’Écriture (cf. 1 Jn 5, 16-17), la distinction entre péché mortel et péché véniel s’est imposée dans la tradition de l’Église. L’expérience des hommes la corrobore.
1855. Le péché mortel détruit la charité dans le cœur de l’homme par une infraction grave à la loi de Dieu ; il détourne l’homme de Dieu, qui est sa fin ultime et sa béatitude en Lui préférant un bien inférieur.
Le péché véniel laisse subsister la charité, même s’il l’offense et la blesse.
1856. Le péché mortel, attaquant en nous le principe vital qu’est la charité, nécessite une nouvelle initiative de la miséricorde de Dieu et une conversion du cœur qui s’accomplit normalement dans le cadre du sacrement de la Réconciliation :
Lorsque la volonté se porte à une chose de soi contraire à la charité par laquelle on est ordonné à la fin ultime, le péché par son objet même a de quoi être mortel... qu’il soit contre l’amour de Dieu, comme le blasphème, le parjure, etc. ou contre l’amour du prochain, comme l’homicide, l’adultère, etc ... En revanche, lorsque la volonté du pécheur se porte quelquefois à une chose qui contient en soi un désordre mais n’est cependant pas contraire à l’amour de Dieu et du prochain, tel que parole oiseuse, rire superflu, etc., de tels péchés sont véniels (S. Thomas d’A., s. th. 1-2, 88, 2).
1857. Pour qu’un péché soit mortel trois conditions sont ensemble requises : " Est péché mortel tout péché qui a pour objet une matière grave, et qui est commis en pleine conscience et de propos délibéré " (RP 17).
1858. La matière grave est précisée par les Dix commandements selon la réponse de Jésus au jeune homme riche : " Ne tue pas, ne commets pas d’adultère, ne vole pas, ne porte pas de faux témoignage, ne fais pas de tort, honore ton père et ta mère " (Mc 10, 18). La gravité des péchés est plus ou moins grande : un meurtre est plus grave qu’un vol. La qualité des personnes lésées entre aussi en ligne de compte : la violence exercée contre les parents est de soi plus grave qu’envers un étranger.
1859. Le péché mortel requiert pleine connaissance et entier consentement. Il présuppose la connaissance du caractère peccamineux de l’acte, de son opposition à la Loi de Dieu. Il implique aussi un consentement suffisamment délibéré pour être un choix personnel. L’ignorance affectée et l’endurcissement du cœur (cf. Mc 3, 5-6 ; Lc 16, 19-31) ne diminuent pas, mais augmentent le caractère volontaire du péché.
1860. L’ignorance involontaire peut diminuer sinon excuser l’imputabilité d’une faute grave. Mais nul n’est censé ignorer les principes de la loi morale qui sont inscrits dans la conscience de tout homme. Les impulsions de la sensibilité, les passions peuvent également réduire le caractère volontaire et libre de la faute, de même que des pressions extérieures ou des troubles pathologiques. Le péché par malice, par choix délibéré du mal, est le plus grave.
1861. Le péché mortel est une possibilité radicale de la liberté humaine comme l’amour lui-même. Il entraîne la perte de la charité et la privation de la grâce sanctifiante, c’est-à-dire de l’état de grâce. S’il n’est pas racheté par le repentir et le pardon de Dieu, il cause l’exclusion du Royaume du Christ et la mort éternelle de l’enfer, notre liberté ayant le pouvoir de faire des choix pour toujours, sans retour. Cependant si nous pouvons juger qu’un acte est en soi une faute grave, nous devons confier le jugement sur les personnes à la justice et à la miséricorde de Dieu.
1862. On commet un péché véniel quand on n’observe pas dans une matière légère la mesure prescrite par la loi morale, ou bien quand on désobéit à la loi morale en matière grave, mais sans pleine connaissance ou sans entier consentement.
1863. Le péché véniel affaiblit la charité ; il traduit une affection désordonnée pour des biens créés ; il empêche les progrès de l’âme dans l’exercice des vertus et la pratique du bien moral ; il mérite des peines temporelles. Le péché véniel délibéré et resté sans repentance nous dispose peu à peu à commettre le péché mortel. Cependant le péché véniel ne rompt pas l’Alliance avec Dieu. Il est humainement réparable avec la grâce de Dieu. " Il ne prive pas de la grâce sanctifiante ou déifiante et de la charité, ni par suite, de la béatitude éternelle " (RP 17) :
L’homme ne peut, tant qu’il est dans la chair, éviter tout péché, du moins les péchés légers. Mais ces péchés que nous disons légers, ne les tiens pas pour anodins : si tu les tiens pour anodins quand tu les pèses, tremble quand tu les comptes. Nombre d’objets légers font une grande masse ; nombre de gouttes emplissent un fleuve ; nombre de grains font un monceau. Quelle est alors notre espérance ? Avant tout, la confession ... (S. Augustin, ep. Jo. 1, 6).
1864. " Tout péché et blasphème sera remis aux hommes, mais le blasphème contre l’Esprit ne sera pas remis " (Mt 12, 31 ; cf. Mc 3, 29 ; Lc 12, 10). Il n’y a pas de limites à la miséricorde de Dieu, mais qui refuse délibérément d’accueillir la miséricorde de Dieu par le repentir rejette le pardon de ses péchés et le salut offert par l’Esprit Saint (cf. DeV 46). Un tel endurcissement peut conduire à l’impénitence finale et à la perte éternelle.
1865. Le péché crée un entraînement au péché ; il engendre le vice par la répétition des mêmes actes. Il en résulte des inclinations perverses qui obscurcissent la conscience et corrompent l’appréciation concrète du bien et du mal. Ainsi le péché tend-il à se reproduire et à se renforcer, mais il ne peut détruire le sens moral jusqu’en sa racine.
2351. La luxure est un désir désordonné ou une jouissance déréglée du plaisir vénérien. Le plaisir sexuel est moralement désordonnée, quand il est recherché pour lui-même, isolé des finalités de procréation et d’union.
2352. Par la masturbation, il faut entendre l’excitation volontaire des organes génitaux, afin d’en retirer un plaisir vénérien. " Dans la ligne d’une tradition constante, tant le magistère de l’Église que le sens moral des fidèles ont affirmé sans hésitation que la masturbation est un acte intrinsèquement et gravement désordonné ". " Quel qu’en soit le motif, l’usage délibéré de la faculté sexuelle en dehors des rapports conjugaux normaux en contredit la finalité ". La jouissance sexuelle y est recherchée en dehors de " la relation sexuelle requise par l’ordre moral, celle qui réalise, dans le contexte d’un amour vrai, le sens intégral de la donation mutuelle et de la procréation humaine " (CDF, décl. " Persona humana " 9).
Pour former un jugement équitable sur la responsabilité morale des sujets et pour orienter l’action pastorale, on tiendra compte de l’immaturité affective, de la force des habitudes contractées, de l’état d’angoisse ou des autres facteurs psychiques ou sociaux qui peuvent atténuer, voire même réduire au minimum la culpabilité morale.
2353. La fornication est l’union charnelle en dehors du mariage entre un homme et une femme libres. Elle est gravement contraire à la dignité des personnes et de la sexualité humaine naturellement ordonnée au bien des époux ainsi qu’à la génération et à l’éducation des enfants. En outre c’est un scandale grave quand il y a corruption des jeunes.
2354. La pornographie consiste à retirer les actes sexuels, réels ou simulés, de l’intimité des partenaires pour les exhiber à des tierces personnes de manière délibérée. Elle offense la chasteté parce qu’elle dénature l’acte conjugal, don intime des époux l’un à l’autre. Elle porte gravement atteinte à la dignité de ceux qui s’y livrent (acteurs, commerçants, public), puisque chacun devient pour l’autre l’objet d’un plaisir rudimentaire et d’un profit illicite. Elle plonge les uns et les autres dans l’illusion d’un monde factice. Elle est une faute grave. Les autorités civiles doivent empêcher la production et la distribution de matériaux pornographiques.
2355. La prostitution porte atteinte à la dignité de la personne qui se prostitue, réduite au plaisir vénérien que l’on tire d’elle. Celui qui paie pêche gravement contre lui-même : il rompt la chasteté à laquelle l’engageait son Baptême et souille son corps, temple de l’Esprit Saint (cf. 1 Co 6, 15-20). La prostitution constitue un fléau social. Il touche habituellement des femmes, mais aussi des hommes, des enfants ou des adolescents (dans ces deux derniers cas, le péché se double d’un scandale). S’il est toujours gravement peccamineux de se livrer à la prostitution, la misère, le chantage et la pression sociale peuvent atténuer l’imputabilité de la faute.
2356. Le viol désigne l’entrée par effraction, avec violence, dans l’intimité sexuelle d’une personne. Il est atteinte à la justice et à la charité. Le viol blesse profondément le droit de chacun au respect, à la liberté, à l’intégrité physique et morale. Il crée un préjudice grave, qui peut marquer la victime sa vie durant. Il est toujours un acte intrinsèquement mauvais. Plus grave encore est le viol commis de la part des parents (cf. inceste) ou d’éducateurs envers les enfants qui leur sont confiés.
2357. L’homosexualité désigne les relations entre des hommes ou des femmes qui éprouvent une attirance sexuelle, exclusive ou prédominante, envers des personnes du même sexe. Elle revêt des formes très variables à travers les siècles et les cultures. Sa genèse psychique reste largement inexpliquée. S’appuyant sur la Sainte Écriture, qui les présente comme des dépravations graves (cf. Gn 19, 1-29 ; Rm 1, 24-27 ; 1 Co 6, 10 ; 1 Tm 1, 10), la Tradition a toujours déclaré que " les actes d’homosexualité sont intrinsèquement désordonnés " (CDF, décl. " Persona humana " 8). Ils sont contraires à la loi naturelle. Ils ferment l’acte sexuel au don de la vie. Ils ne procèdent pas d’une complémentarité affective et sexuelle véritable. Ils ne sauraient recevoir d’approbation en aucun cas.
2358. Un nombre non négligeable d’hommes et de femmes présente des tendances homosexuelles foncières. Cette propension, objectivement désordonnée, constitue pour la plupart d’entre eux une épreuve. Ils doivent être accueillis avec respect, compassion et délicatesse. On évitera à leur égard toute marque de discrimination injuste. Ces personnes sont appelées à réaliser la volonté de Dieu dans leur vie, et si elles sont chrétiennes, à unir au sacrifice de la croix du Seigneur les difficultés qu’elles peuvent rencontrer du fait de leur condition.
2359. Les personnes homosexuelles sont appelées à la chasteté. Par les vertus de maîtrise, éducatrices de la liberté intérieure, quelquefois par le soutien d’une amitié désintéressée, par la prière et la grâce sacramentelle, elles peuvent et doivent se rapprocher, graduellement et résolument, de la perfection chrétienne.
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